LA MATIÈRE MÉDICALE HOMÉOPATHIQUE
Elle constitue pour le praticien homéopathe un outil de travail indispensable. On ne peut qu’être admiratif devant la qualité des observations médicales qu’elle contient, en rappelant que la quasi totalité des pathogénésies ont été réalisées au XIX° siècle, époque où les moyens d’investigations modernes n’existaient pas encore.
La matière médicale de chaque médicament à usage homéopathique comprend trois sources différentes et complémentaires :
Première source = la pathogénésie proprement dite :
C’est la source de renseignements la plus spécifique à l’homéopathie. Il s’agit de donner une substance active à des sujets en bonne santé. Selon la posologie, certains sujets réagissent en développant des symptômes qui sont constatés, relevés et notés selon la chronologie de leur apparition. Progressivement, les conditions de la pathogénésie ont été modifiées dans le but d’améliorer la fiabilité des pathogénésie. Aujourd’hui, le nombre de volontaires doit être assez élevé (trente à cent). Ils subissent un examen médicale complet et seuls les sujets en équilibre de santé sont retenus. Ensuite, le ou les médecins qui dirigent l’expérimentation et les volontaires ignorent la nature de la substance qui se présente sous forme de tubes identiques et numérotés, certains ne comprenant qu’un placebo.
Une première notion se dégage de l’expérimentation = la sensibilité individuelle. Tous les volontaires ne réagissent pas et ils sont d’autant moins nombreux que la posologie progresse dans l’infinitésimal. Une seconde notion : le type sensible au médicament. Les volontaires qui ont réagi ont quelque chose en commun = soit une morphologie semblable, soit un comportement particulier, soit un mélange des deux. Et l’on retrouve parfois ce type sensible chez les patients. Ainsi le carbonate de calcium, sel indispensable au développement osseux correspond à des sujets de type bréviligne, le phosphate de calcium à des sujets longilignes. Ou encore les sujets réagissant mieux à THUYA OCCIDENTALIS, substance d’origine végétale et donc totalement étrangère à l’organisme, ont en commun une silhouette présentant souvent une rétention d’eau autour des hanches ou les ailes du nez luisante par une sécrétion épaisse, et bien d‘autres signes comme une tendance dépressive avec des idées obsessionnelles.
Ensuite, l’expérimentation pathogénétique permet de définir une hiérarchisation des symptômes, basée sur le nombre de sujets ayant réagi :
Symptômes dits de degré fort : ils sont retrouvés chez tous les sujets ayant réagi.
Symptômes dits de degré moyen : ils sont retrouvés chez la moitié ou les deux tiers des sujets ayant réagi.
Symptômes dits de degré faible : ils ne sont retrouvés que chez quelques sujets ayant réagi.
On retrouve cette triple hiérarchisation quantitative dans de nombreux ouvrages de matière médicale exprimée par les caractères d’imprimerie utilisés : majuscules grasses pour le degré fort, italiques pour le degré moyen, caractères normaux pour le degré faible.
Deuxième source = les données toxicologiques.
Il est évident que lors de l’expérimentation il n’est jamais possible de mettre en danger la santé des volontaires. Mais outre ces raisons éthiques, il est inutile de recourir à cette extrémité car la toxicologie fournit tous les renseignements possibles = maladies professionnelles, intoxications accidentelles, suicide, meurtre et plus récemment l’expérimentation animale.
Cette deuxième source toxicologique permet parfois des actions ponctuelles. Par exemple, l’expérimentation du phosphore blanc chez l’animal a montré que les lésions hépatiques sont tout à fait comparables à celles que produit l’hépatite virale. Aussi est-il fréquent en médecine homéopathique de commencer le traitement d’une telle hépatite par de hautes dilutions de PHOSPHORUS, quitte à l’associer au médicament de fond dégagé par la similitude. Autre exemple = l’expérimentation animale a montré que l’ergot de seigle (SECALE CORNUTUM) provoquait des petits infarctus des capillaires avec des ulcérations nécrotiques, lésions semblables à celles que l’on observe dans les mécanismes physio-pathologiques des aphtes. Aussi est-il logique, du moins dans certains cas d’aphtoses buccales rebelles, d’associer ce médicament basé sur la similitude lésionnelle, au médicament de fond.
Troisième source = l’expérience clinique des praticiens.
L’homéopathie est par essence une technique médicale basée sur l’observation et l’expérimentation chez l’homme. Il est donc logique que dès ses premières applications thérapeutiques, HAHNEMANN puis tous les médecins aient observés certains faits. Par exemple, certains symptômes présents chez le malade mais n’appartenant pas à la matière médicale d’un médicament pouvaient disparaître sous l’action de ce dernier. Ils ont donc été ajoutés à la matière médicale.
Ensuite, la pratique médicale a montré que l’indication de tel ou tel médicament apparaissait à la suite d’une circonstance précise. Par exemple, lorsque HAHNEMANN a réalisé la pathogénésie d’ACONIT, il a constaté l’apparition d’un état inflammatoire aigu ou d’une névralgie violente et subite. Par la suite, il a été constaté que ces deux états pathologiques survenaient très souvent après que le patient eut été soumis à l’action d’un vent sec et glacial. Cette circonstance a donc été ajoutée à la matière médicale de ce médicament. Ainsi et pour de nombreux médicaments, la matière médicale détaille les circonstances au cours desquelles sont apparus les symptômes de tel ou tel médicament. Mais pour d’autres médicaments, aucune circonstance étiologique précise n’a pu être mise en évidence.
Il en existe bien d'autres...