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 TRAITEMENT HOMEOPATHIQUE

DES TROUBLES BUCCO-DENTAIRES DES LUETIQUES



            

Si l’on a bien suivi le développement qui précède, on comprendra facilement la nécessité de scinder en deux parties distinctes le traitement homéopathique des troubles bucco-dentaires des luétiques. Il y a d’abord les médicaments qui correspondent aux troubles de la croissance, donc indiqués à l’évidence chez l’enfant à risques, avec le volet préventif et ensuite le second curatif. Puis les médicaments indiqués selon la similitude, en dehors des problèmes de croissance, que l’on retrouve à l’évidence chez l’adulte, mais encore chez l’enfant. Les premiers sont des minéraux impliqués dans l’ostéogenèse et ce n’est pas par hasard que l’on retrouve là les médicaments à base de fluor, essentiellement CALCAREA FLUORICA et FLUORIC ACID., ou SILICEA. Les seconds sont, et ce n’est pas un hasard, des médicaments impliqués entre autres indications, dans le traitement de la syphilis comme MERCURIUS SOLUBILIS et les autres mercuriaux, et d’autres médicaments répondant à tous les aspects de la pathologie des luétiques.



LES TROUBLES DE LA CROISSANCE

DES DYSTROPHIQUES LUETIQUES



            En principe, CALCAREA FLUORICA, FLUORIC ACID. et SILICEA sont des médicaments bien connus des chirurgiens-dentistes et nous les avons très souvent étudiés dans nos cours ou dans nos bulletins. Il n’est donc pas utile des les reprendre d’une manière exhaustive. Rappelons seulement quelques signes essentiels.



CALCAREA FLUORICA :


            Un peu de fluor, ça va. Un peu trop de fluor, bonjour les dégâts ! Cette parodie du slogan publicitaire contre l’alcoolisme illustre bien le problème du fluor. Le di-fluorure de calcium est indispensable à l’ostéogenèse. Il est présent à l’évidence dans les tissus durs : os, dents, mais également dans les fibres élastiques du tissu conjonctif et des vaisseaux, dans le peau. Il apporte l’élément de dureté, de la même manière que la silice. Tout le problème réside dans la quantité optimale qui peut varier d’un sujet à un autre. Les intoxications chroniques par le fluor sont bien connues et l’on sait que certaines régions ayant des eaux trop riches en fluor voient leur population atteinte de fluorose chronique, comme le darmous au Maroc.


            Nous avons dit et répété que la constatation de stigmates ressemblant à ceux fluorés ne signifie pas ipso facto que le sujet est réellement et obligatoirement intoxiqué par le fluor. Cette intoxication existe certes et souvent, elle peut faire suite à une fluoration accidentelle ou médicamenteuse proposée trop systématiquement dans la prévention de la carie dentaire ou de l’ostéoporose des personnes âgées ou des femmes ménopausées. Mais il y a tout le cortège de lésions semblables ayant une autre origine, décrite dans le chapitre sur les facteurs étiologiques du mode luétique, comme les irradiations ionisantes, les embryopathies ou foetopathies, l’alcool, les intoxications par métaux lourds, etc...

  

La prévention homéopathique par CALCAREA FLUORICA ou le traitement curatif seront systématiquement proposés chaque fois que le médecin ou le chirurgien-dentiste constatera soit chez la femme enceinte (et/ou chez le père) ou chez le jeune enfant quelques-uns des signes suivants, même au degré faible :

  

Les modalités générales valorisent ces signes :

  


            La posologie tient compte du contexte clinique et du but thérapeutique. A titre préventif chez le tout jeune enfant, il est utile, selon les conseils de R. ZISSU, de mélanger les dilutions : 6X trituration, deux mesures à sec sur la langue avant les trois repas pour apporter le sel de fluor en quantité très faible + une dilution moyenne ou plus haute une à deux fois par semaines selon le contexte clinique. Ne pas oublier que le métabolisme du fluor est lent, certes moins que celui de la silice, d’où la nécessité de traitements prolongés ou répétés par périodes.

  

Calcarea fluorica est très souvent utile en orthodontie, aussi bien en préventionnque tout au long du traitement, mais aussi durant la contention

FLUORIC ACIDUM :


            La présence d’acide dans ce médicament explique son indication pour des troubles franchement lésionnels. Lorsqu’on dépose une goutte d’acide sur une muqueuse, sur la peau ou sur n’importe quel autre tissu, il y a rapidement formation d’une ulcération par destruction des tissus atteints. Lorsqu’un veut bien se souvenir que l’acide fluorhydrique est utilisé pour la gravure du verre, on peut imaginer son pouvoir de destruction. Alors qu’avec CALCAREA FLUORICA, les troubles sont moins lésionnels, moins destructeurs. Et comme il est un composant naturel de la matière vivante, ce médicament joue un rôle préventif et curatif des perturbations de la croissance, ce que ne fait pas FLUORIC ACID. La Matière médicale de ce médicament concerne les mêmes cibles que celles de CALCAREA FLUORICA = les tissus riches en fluor, dont les dents, les os, le tissu fibro-conjonctif, la peau et les phanères.


            Selon l’âge de la décompensation, qui se produit par les mêmes causes que pour CALCAREA FLUORICA, l’atteinte des dents sera nuancée, allant d’une simple altération modérée de l’émail à des destructions très importantes dont la fluorose chronique rend compte. A noter chez ces sujets la fréquence des complications apicales avec suppuration, et surtout une fistule dont l’orifice est particulièrement irritant (au contraire de SILICEA). C’est chez les enfants FLUOR ACID. que l’on trouve le tableau clinique de la mélanodontie ou plus généralement celui d’une atteinte de toutes les dents de lait qui sont rapidement détruites avec le cortège habituel d’abcès, de suppuration, de parulie ou de fistules. Chez l’adulte, ancien CALCAREA FLUORICA, on constatera surtout une atteinte des procès alvéolaire avec destruction. C’est donc avant tout un remède de parodontopathie. On trouve ce médicament encore indiqué dans les formes disons moins graves pour les caries des collets radiculaires. Ou encore pour des ulcérations linguales à tendance phagédénique.


            Il ne faut oublier que le fluor est un halogène, il peut être indiqué dans l’hyperthyroïdie et d’une manière plus générale dans les troubles résultant de la mise en œuvre du mode tuberculinique dans sa phase dite « oxygénoïde ». A ce titre, il faut comparer FLUORIC ACID. à IODUM, dont il partage l’appétit nettement augmenté et la thermophobie, sans oublier la tendance aux indurations et hypertrophies des glandes. Nous avons souvent souligné les conséquences parfois graves pour la minéralisation des dents lorsque les deux modes tuberculinique et luétique sont mis en œuvre simultanément, le premier posant le problème des minéraux dont a besoin la dent et qui peuvent manquer parce que utilisés ailleurs, le second expliquant les perturbations de la croissance par suite des inflammations oblitérantes des vaisseaux. 


            CALCAREA FLUORICA et FLUORIC ACID. se ressemblent sur bien des points, bien que le second offre plus de lésions. L’une des principales différences concerne le comportement vis-à-vis des facteurs climatiques. La présence de l’élément « carbone » dans le premier explique la frilosité, signe commun à tous les Calcarea. FLUORIC ACID. est un thermophobe, il est aggravé par la chaleur sous toutes ses formes et amélioré par le froid (applications froides notamment).


            L’autre différence concerne le comportement. Le fluor favorise la dépression, alors que l’acide entraîne une faiblesse irritable. FLUORIC ACID., synthèse des deux, présente une très grande instabilité mentale, qui est par ailleurs l’une des caractéristiques du mode luétique. Ce n’est certes pas par hasard. L’instabilité mentale s’exprime par une double tendance, qui correspond aux deux phases successives de l’action d’un toxique, excitation d’abord puis dépression. FLUORIC ACID. est donc un exalté vite enthousiaste, mais découragé rapidement. Il manque de persévérance dans tout ce qu’il entreprend et son instabilité explique ses besoins de changement (profession, vie affective, etc...).


SILICEA :


            Il ne faut pas s’étonner de trouver dans la présente étude l’indication de SILICEA dans le traitement des troubles bucco-dentaires des luétiques. D’abord parce que ce médicament constitue un remède quasi obligatoire dans les conséquences du rachitisme, ensuite parce qu’il est souvent indiqué dans les manifestations scléreuses, fréquentes chez les luétiques. Du fait de la frilosité, SILICEA est plutôt proche de CALCAREA FLUORICA, dont il peut être le complémentaire pour de nombreux troubles liés à la déminéralisation et au rachitisme ou encore dans les processus suppurés tendant à la chronicité et différents de ceux de FLUORIC ACID. Par exemple, ils ont en commun les fistules ou les éliminations d’esquilles osseuses, mais dans FLUORIC ACID. le contexte est inflammatoire avec un violent prurit de l’orifice de la fistule, ce qui n’est pas le cas de SILICEA. Il en va de même avec les modalités thermiques.


            Nous avons déjà étudié SILICEA lors du cours sur le mode tuberculinique. Nous n’insistons donc pas ici.               

LES PRINCIPAUX MEDICAMENTS DES

TROUBLES BUCCO-DENTAIRES

 DES LUETIQUES NON FLUORIQUES



            Tous les médicaments étudiés ci-dessous peuvent être indiqués indifféremment chez l’enfant ou chez l’adulte. Il en va de même des précédents qui certes concernent davantage l’enfant du fait de la croissance et des troubles qui peuvent résulter de la mise en œuvre du mode luétique.



MERCURIUS SOLUBILIS :


            C’est sans doute le médicament le plus souvent indiqué dans les troubles bucco-dentaires des luétiques. Sa toxicité est bien connue, très souvent incriminée dans des intoxications de toutes sortes, industrielles ou autres, dont l’accusation des amalgames dentaires. Cette toxicité, quelle que soit son intensité, s’exprime notamment par la gingivo-stomatite si caractéristique au point que trop souvent ce médicament est prescrit sans individualisation suffisante.


Les signes bucco-dentaires :

  


            Comme on peut le voir, les signes bucco-dentaires sont très nombreux et souvent au degré fort. Et cependant, ils ne suffisent pas à justifier, à eux seuls, la prescription de ce médicament. D’abord et paradoxalement, du moins en apparence, parce qu’ils sont tous présents, mais ils sont communs à de nombreux médicaments. Ensuite parce que les signes locaux doivent être insérés dans leur contexte général, qui les valorise et permet l’individualisation du médicament indiqué.


            Voici une synthèse de la Matière médicale de MERCURIUS SOLUBILIS.

  

  

  

  

  

  

  

  

  


            Voilà donc les grands signes sur lesquels repose l’indication de MERCURIUS SOLUBILIS. Il faut souligner que ce médicament de fond se trouve très souvent indiqué pour des troubles inflammatoires aiguës ou chroniques. Et pour ces derniers, il faut rappeler la posologie = les basses dilutions favorisent le sens centrifuge (mais ne pas donner en dessous de la 5 CH du fait de la toxicité) en pensant aux risques de suppuration en cavité close - les hautes dilutions (15 ou 30 CH) favorisent le sens centripète - enfin les dilutions moyennes sont ambivalentes. Comme tous les toxiques puissants, MERCURIUS SOL. Ne doit pas être renouvelé trop souvent = une à deux fois par jour au maximum dans un cas aigu.

Mercurius solubilis chez l’enfant :


            Le mercure est un toxique et surtout une substance étrangère à l’organisme. Pourquoi rappeler ces évidences ? Tout simplement pour rappeler que l’action toxique se manifeste chez n’importe quel sujet, quelle que soit sa morphologie. Et qu’il n’y a pas de type morphologique particulier. Ce n’est pas ce qui se passe par exemple pour PHOSPHORUS. Le phosphore étant l’un des plus importants minéraux indispensables à l’ostéogenèse, il module un type morphologique qui porte son nom, le type « phosphorique » grand et maigre, longiligne. Cette action métabolique explique tout un ensemble de signes et symptômes, que l’on retrouve chez le tuberculinique à la phase oxygénoïde. Mais le phosphore est aussi un toxique puissant qui peut atteindre n’importe qui, ce qui explique d’autres signes et symptômes., comme par exemple l’action sur le sang et la coagulation, quel que soit le biotype.


            Rien de tel avec le mercure, qui n’a aucune action métabolique. Cependant, il y a deux types d’enfants répondant à MERCURIUS SOLUBILIS : un type gras et un type maigre.


            Le type gras est le plus fréquent et il offre de nombreuses similitudes avec CALCAREA CARBONICA : sensibilité au froid humide qui joue un rôle déterminant dans le déclenchement d’une pathologie O.R.L. fréquente et surtout itérative chez l’enfant durant la saison hivernale - atteinte des formations lympho-ganglionnaires avec hypertrophie - lymphatisme et lenteur, phobies et apathie après une phase d’excitation. Il est intéressant de noter que chez cet enfant qui se défend mal, les modes réactionnels sont imbriqués. L’enfant CALCAREA CARBONICA use avant tout du mode psorique notamment parce que c’est celui de ses parents ou de l’un des deux. Ensuite, il met rapidement en œuvre le mode sycotique parce que son système immunitaire est trop sollicité et surtout déprimé par la sensibilité au froid, par le ralentissement métabolique et par les médicaments trop abondamment prescrits. Certains de ces enfants CALCAREA CARBONICA évoluent vers MERCURIUS SOLUBILIS pour différentes raisons et sans doute encore une fois du fait d’un facteur héréditaire. Le mode luétique influence alors l’aspect de la pathologie, notamment dans le sens d’une tendance à la suppuration et à l’ulcération. Or dans cette occurrence, on retrouve un autre médicament assez complexe = HEPAR SULFUR, autre remède important de suppuration aiguë, mais aussi chronique (mais il est aggravé par le froid et amélioré par la chaleur, comme Arsenicum album). Et curieusement, HEPAR SULFUR est le plus important remède antidote du mercure.  Déjà le nourrisson du type Mercurius exprime ses difficultés défensives qui offrent encore une fois des similitudes avec CALCAREA CARBONICA = grosse tête avec fontanelles larges, peau malsaine sujette à un eczéma humide qui suppure facilement, érythème fessier (Medorrhinum). Puis rapidement peuvent apparaître des otites suppurées avec la note luétique représentée par une tendance à l’ulcération du tympan. Aussi bien chez CALCAREA CARBONICA que chez MERCURIUS SOLUBILIS, la dentition peut être retardée et difficile (convulsions).


            Autres faits = MERCURIUS SOLUBILIS comme CALCAREA CARBONICA sont indiqués dans les suites de suppression d’élimination. MERCURIUS SOL. est l’un des remèdes de suites de traumatisme crânien, notamment chez l’enfant. Comme d’ailleurs NATRUM SULFURICUM, le plus important remède du mode sycotique dans sa phase hydrogénoïde, complémentaire de CALCAREA CARBONICA (entre autres)  dans l’imbibition hydrique et dans la sensibilité au froid humide ou encore dans les conséquences iatrogènes de certains médicaments déprimant le système immunitaire comme les antibiotiques ou les vaccins. Voilà donc une situation clinique complexe du fait de l’expression simultanée de plusieurs modes réactionnels, ce qui est l’expression d’une insuffisance immunitaire. Heureusement, il y a des différences qui permettent de comprendre telle ou telle situation. Chez un enfant CALCAREA CARBONICA, l’indication de MERCURIUS n’est que transitoire, momentanée, expliquée par des facteurs circonstanciels et PSORINUM est le complémentaire diathésique de fond lorsque l’enfant ne réagit plus très bien. Chez l’enfant luétique, MERCURIUS SOL. est LE  remède de fond, avec le renfort du biothérapique luétique qu’est LUESINUM.  


            L’enfant Mercurius sol. consulte son dentiste pour = des aphtes parfois graves, toujours récidivants, douloureux, accompagnés d’adénopathies satellites, d’une hypersalivation nauséabonde surtout nocturne,  ou pour une gingivite, parfois d’origine herpétique, mais surtout pour des abcès d’origine dentaire notamment lorsqu’existe une note dystrophique dans la morphologie avec des caries des dents de lait plus ou moins importantes. Enfin cet enfant grince souvent des dents la nuit, son sommeil est troublé par des rêves anxiogènes. L’enfant MERCURIUS peut consulter également pour des caries dentaires. MERCURIUS SOL. est cité au degré fort dans le Répertoire de KENT à la rubrique « Caries » mais est oublié pour les caries du collet, alors qu’on en trouve mention dans certaines Matières médicales ou publications. Dans cette localisation, sur 14 médicaments il y en a 8 que l’on peut classer parmi les remèdes indiqués dans les troubles du mode luétique = ARGENTUM NITRICUM, AURUM METALLICUM, CALCAREA FLUORICA, FLUORIC ACID., IODUM, MERCURIUS SOL., LUESINUM, MEZEREUM, les autres sont AMMONIUM CARBONICUM, ARSENICUM ALBUM, CALCAREA CARBONICA, SILICEA, THUYA et TUBERCULINUM.


            C’est sans doute dans le type maigre de MERCURIUS que l’on rencontre plus volontiers la tendance aux caries dentaires. Ce type maigre correspond à un enfant rachitique chez lequel sont mis en œuvre les modes tuberculinique et luétique, conjonction très défavorable à la minéralisation dentaire. D’où les caries importantes, notamment des dents de lait avec les habituelles complications apicales comme les abcès, la gingivite, etc...

Mercurius solubilis chez l’adulte :


            Une fois encore, une situation complexe sur le plan diathésique se retrouve chez l’adulte Mercurius. Le mercure, il faut le rappeler,  est un toxique puissant et surtout une substance étrangère à l’organisme, il peut donc intoxiquer n’importe qui. Il y a adéquation entre les troubles qu’il produit et ceux de la syphilis et d’une manière plus générale ceux du mode luétique, chez n’importe quel sujet.


            Le patient Mercurius consulte son dentiste le plus souvent pour une gingivite ulcéro-nécrotique avec les signes décrits plus haut, ou encore pour une aphtose buccale aiguë ou chronique. Ces troubles buccaux peuvent être plus ou moins isolés, mais ils se produisent le plus souvent dans un contexte digestif = foie gros et douloureux au toucher ou couché sur le côté droit, digestion lente avec des renvois, des régurgitations (liquide rance), des nausées, des brûlures (pyrosis), de la flatulence abdominale (ventre dur, sensible au toucher) et de temps en temps des périodes de diarrhée, souvent hémorragique, presque toujours suivie de ténesme. La colite ulcéreuse est fréquente, ou la recto-colite, souvent par suite d’amibiase. Rappelons qu’en 1972, notre confrère Jean LEGER a soutenu la thèse de rapports de cause à effet entre l’amibiase sous sa forme neuro-végétative, donc la moins connue, et la maladie parodontale. Il expliquait que cette maladie souvent oubliée pouvait concerner une grande partie de la population de la région parisienne (plus du tiers !).  Dans ce contexte digestif, le remède le plus voisin est NATRUM SULFURICUM, car ils ont plusieurs troubles en commun, comme la sensibilité au froid humide.


            MERCURIUS SOL. peut également avoir une insuffisance rénale, ce qui explique l’atteinte parodontale. Ainsi, par action sur la fonction hépatique dont on connaît les conséquences bucco-dentaires ou par action sur la fonction rénale, les facteurs généraux de la maladie parodontale sont réunis pour en expliquer sa fréquence, son évolution et sa gravité. D’où deux évidences =la chirurgie parodontale sera déconseillée sous peine de récidive rapide et ce aussi longtemps que les deux fonctions hépatique et rénale ne seront pas rétablies  - et comme le traitement des troubles buccaux passe d’abord par celui des causes générales, cela exige la prise en charge par le médecin. Mais il existe des formes encore discrètes qui s’expriment par une hypersalivation nauséabonde, par le goût métallique prononcée et par des sueurs surtout nocturnes laissant le patient mal à l’aise, alors que l’état gingival et surtout parodontal n’est pas encore trop dégradé. Dans ces cas encore frustres sur le plan buccal,  une action précoce de MERCURIUS SOL. donne de bons résultats. On peut voir encore ces patients pour une aphtose buccale,  sans retrouver le contexte gingival ou parodontal. Il est alors parfois difficile de mettre en évidence ce médicament sur des signes encore peu nuancés et l’on hésite souvent entre plusieurs médicaments. C’est toute la difficulté de l’homéopathie, mais c’est aussi son avantage d’une action précoce et préventive sur les menaces connues parce que bien décrites dans la matière médicale.


            Soulignons en passant que dans ces cas encore peu marqués, l’ordinateur rend de grands services. Dans le programme AIDE-HOMEO, la sélection des 5 symptômes banals suivants : goût métallique + salivation intense + haleine fétide + transpiration ne soulageant pas + transpiration nocturne donne 9 médicaments = CALCAREA CARBONICA, CHELIDONIUM, LYCOPODIUM, MERCURIUS SOL., NUX VOMICA, PHOSPHORUS et SULFUR. Mais si l’on ajoute les 4 signes généraux suivants : Adénopathies + agitation + comportement précipité et tendance aux ulcérations, un seul médicament sort â MERCURIUS SOL.


            Il est donc possible de mettre en évidence l’indication de MERCURIUS sur des signes encore banals, certainement réversibles à ce stade. Ensuite se pose le problème diathésique, après le choix du médicament semblable, c’est-à-dire le problème de la compréhension du problème buccal dans une histoire personnelle évolutive. Car une gingivite a toujours plusieurs significations et la prévention de la récidive doit tenir compte de chaque mode réactionnel mis en œuvre par chaque patient. MERCURIUS SOLUBILIS se trouve ainsi souvent indiqué du fait de la polarité buccale de son action toxique. Il est intéressant de noter qu’il se trouve plus souvent indiqué pour une pathologie aiguë que chronique. La pathologie aiguë peut être interprétée comme une tentative d’élimination chez un sujet psorique qui ne parvient plus à maintenir son équilibre par le seul mode psorique et qui met en oeuvre le mode luétique jusque-là en réserve, mode sollicité par son mode de vie, qui réunit plusieurs facteurs d’atteinte des fonctions hépatiques et rénales.

ARGENTUM NITRICUM :

            

            Comme le mercure, le nitrate d’argent est une substance toxique et étrangère à l’organisme, il n’a donc pas d’action métabolique mais seulement toxicologique en deux phases (une première d’excitation, une seconde de dépression). Alors que l’argent métallique n’est pas ou peu toxique, ses sels le sont. Le nitrate a une action instable, oxydante et caustique sur les muqueuses et sur la peau. Au niveau des muqueuses, le nitrate d’argent produit une inflammation qui évolue chroniquement vers l’ulcération, avec des excrétions muco-purulentes, parfois sanguinolentes. C’est ce que l’on retrouve, entre autres, au niveau de la muqueuse buccale.


            L’instabilité chimique de ce sel correspond à l’instabilité mentale des luétiques. La causticité sur les muqueuses correspond aux troubles ulcéro-nécrotiques des luétiques. L’action oxydante explique l’anémie et la cachexie, qui correspond à la déminéralisation tuberculinique. Voici donc à partir de la chimie la raison de l’implication de ces deux modes réactionnels.


            Voici d’abord quelques signes bucco-dentaires « bruts », avant quelques commentaires.


D'abord, ce que disent les Matières médicales :

  


Le Répertoire de Kent ajoute :

  


Ce qui est « oublié » et que l'on glane ça et là au gré des lectures :

  


Commentaires :


          ARGENTUM NITRICUM fait partie de ces médicaments qui n'ont que des signes banals au niveau de la bouche et des dents, mais qui se révèlent néanmoins de prescription courante en pratique bucco-dentaire.  Mais évidemment, le choix repose davantage sur l'ensemble des signes psychiques et généraux que sur les signes locaux, bucco-dentaires en l'occurrence.


Déjà le comportement au cabinet dentaire attire l'attention

Le problème de la carie dentaire :


Elle n'est citée nulle part et pourtant, ARGENTUM NITRICUM fait des caries, notamment au niveau des collets.  Cela s'explique, à notre avis, par deux causes: d'abord, quel que soit l'âge, ce patient a de gros désirs de sucreries, dont il abuse parfois, voire souvent, notamment pour calmer son anxiété.  Ensuite, comme il fait tout avec hâte, il se brosse les dents en quelques secondes, lorsqu'il les brosse, parce qu'il n'en a pas toujours le temps, dit-il, ou le pense-t-il !!  D’ailleurs, il en est sincèrement persuadé ! ! ! On peut voir aussi un abus de sucreries, le soir au coucher, surtout chez l'enfant pour apaiser l'angoisse de la nuit.  On ne dira jamais assez combien cette mauvaise habitude est source de caries.  Le traitement des caries du collet est particulièrement douloureux et nécessite presqu'obligatoirement une anesthésie locale.

Chacun sait que ce patient a un conflit permanent avec le temps et avec son emploi du temps, ce qui l'angoisse et celle-ci transpire dans toutes ses activités, même banales.  Avant même d'être levé, il pense déjà à tout ce qui l'attend dans la journée et s'inquiète par avance de ne pas arriver à assumer son emploi du temps, justement par manque de temps, même s'il n'a pas grand chose à faire en réalité.  Aussi n'accorde-t-il pas toute l'attention nécessaire à la réalisation de la tâche présente parce qu'il pense déjà à la suivante. Aussi fait-il tout avec hâte et précipitation.


Cependant, D. DEMARQUE reproche aux différents auteurs contemporains une inflation de signes psychiques de valeur très relative parce que observés chez des sujets hypochondriaques et/ou névrotiques. Il souligne qu’HAHNEMANN, qui a réalisée la première pathogénésie, n’avait observé qu’un seul signe psychique : « Anxiété qui oblige à marcher vite ».

Commentaire

d'Alain HORVILLEUR

Sans souhaiter participer à une querelle, nous dirons seulement que la Matière médicale comprend une troisième source (après la pathogénésie et la toxicologie) qui est l’expérience clinique des praticiens. Et ce n’est certainement pas par hasard que l’on décrit le comportement agité et précipité de ARGENTUM NITRICUM.


Jacqueline BARBANCEY donne quelques précisions intéressantes : d’abord, elle affirme que pour Argentum nitricum le temps passe trop lentement, alors que la plupart des autres auteurs considère le contraire. En fait, Argentum nitricum est toujours anxieux de ce qu’il entreprend, il veut finir avant d’avoir commencé. Ou bien il croit manquer de temps et cela explique son comportement hâtif parce que le temps passe trop vite à son gré. Ou bien il trouve que le temps passe trop lentement alors que d’autres tâches l’attendent. Et de plus, il  a peur du jugement que l’on portera sur son travail. Argentum nitricum, dans le meilleur des cas, est un inquiet par insécurité mentale (à l’image de l’instabilité chimique du nitrate), contre laquelle il se protège en échafaudant des explications plus ou moins farfelues pour se rassurer.

Comme le dit A. HORVILLEUR, Argentum nitricum a surtout « peur de lui-même ». Il a peur de ses propres réactions. Par exemple, sa phobie des hauteurs, des lieux élevés, des ponts entraîne une angoisse profonde parce qu’il a l’impulsion de se jeter dans le vide et donc il fuit ces lieux à grandes enjambées ! J. BARBANCEY ajoute : « A la différence de THUYA qui est assiégé par des préoccupations obsédantes mais ne demande qu’à être rassuré, ARGENTUM NITRICUM a des convictions tenaces qu’aucun raisonnement logique ne peut entamer... ».  Il faudrait tout citer de cette étude passionnante, terminons par cette belle formule : « Lui qui est toujours en état d’urgence d’avoir (avoir fait, avoir reçu, avoir fini... avant d’avoir commencé), interpose justement dans cet engrenage sans fin des rituels conjuratoires (vérifications, répétitions d’actes, comptabilisations compliquées) qui s’ajoutent, se coaptent les uns aux autres, rempart à la fois protecteur et de plus en plus isolant ».     


On retrouve ce comportement au cabinet dentaire: déjà la perspective d'une séance de soins dentaires lui procure une angoisse qui le fait arriver en avance à son rendez-vous, afin de s'en délivrer au plus vite.  Il arpente la salle d'attente, ouvre la porte de temps en temps pour voir si par hasard on ne l'a pas oublié.  En particulier, il ne supporte pas que la salle d'attente soit déjà pleine de patients, ou qu'elle soit surchauffée.  Cela l'irrite et ajoute à son angoisse.


Il résulte de ce qui précède quelques conseils pratiques : recevoir ce patient le matin en premier rendez-vous et le faire passer immédiatement dans le cabinet dentaire.  On évite ainsi l'angoisse de l'attente, aggravée par la claustrophobie et la chaleur de la salle d'attente, surtout s'il y a déjà quelques patients qui attendent leur tour.  Ensuite, ce patient a une angoisse d'anticipation.  Aussi faut-il lui expliquer ce qu'il a, ce qu'on va lui faire et proposer une anesthésie locale. Enfin, il est préférable d'éviter les séances trop longues.

  

La gingivite :


Cette gingivite est banale en elle-même mais motive l'essentiel des indications de ce médicament.  Les ouvrages négligent l'aspect ulcéreux de cette gingivite alors que le nitrate d'argent a bien une action caustique sur les muqueuses.  La sensation d'écharde ressentie parfois au niveau des ulcérations évoque un complémentaire dans l'aggravation, qui est d'ailleurs un autre composé nitré = NITRI ACID., remède plus lésionnel du fait de la présence d'acide, ses ulcérations ont une nette tendance phagédénique.  Ces deux médicaments ont quelques troubles digestifs en commun, mais le comportement est différent.


            C’est d’ailleurs souvent au cours de troubles digestifs ou peu après que se développe la gingivite. Ce qui domine c’est une dystonie à prédominance neurovégétative du fait de l’action du nitrate d’argent sur le système nerveux. Cela se traduit par de l’aérophagie, de l’aérogastrie avec des  éructations sonores en salves, parfois douloureuses. L’action caustique sur les muqueuses associée à l’anxiété expliquent sans doute la tendance à l’ulcère gastrique ou en tous cas les douleurs rongeantes, au creux épigastrique, survenant ou juste après le repas ou une demi-heure après, aggravées en buvant froid et améliorées en buvant chaud. Il y a parfois des vomissements (aliments mêlés de mucus glaireux souvent sanguinolents), qui améliorent l’aérogastrie. Rappelons la diarrhée verdâtre (comme des épinards hachés) a frigore ou chez le nourrisson au cours de la dentition ou encore la banale diarrhée émotive (au cabinet dentaire par exemple). 


La maladie parodontale :


          Elle est présente dans ARGENTUM NITRICUM, certes au degré faible: rétractions gingivales, gingivorragies, « déchaussement des dents ». En cas d'aggravation, le remède complémentaire est encore une fois NITRI ACID.



La stomatodynie :


Ce n'est certes pas le médicament le plus souvent indiqué.  Rappelons que la stomatodynie est une douleur ressentie dans la bouche en n'importe quel endroit, sans support lésionnel décelable qui peut l'expliquer.  Elle s'explique en fait par somatisation d'une souffrance psychique dans un contexte dépressif très net.  Avec ARGENTUM NITRICUM, il s'agit le plus souvent d'une glossodynie à type de brûlure ou de piqûre comme par une écharde ou encore une sensation de plaie au niveau des papilles linguales.


Le choix du remède tient davantage compte du comportement et des perturbations psychiques chez un sujet agité, anxieux, déprimé par divers soucis d'ordre familial ou professionnel, stressé par la trépidation de la vie moderne et par ses conflits avec le temps qui passe trop vite à son gré ou trop lentement, ce qui l’exaspère.


Aspects diathésiques :


Même s'il faut faire de la peine à certains, ARGENTUM NITRICUM répond par l'ensemble de sa symptomatologie à des troubles relevant de deux modes réactionnels : d'abord le mode luétique, ensuite le mode tuberculinique.  Chez l'adulte, il est parfois indiqué dans des troubles relevant du mode psorique ( à comparer alors à NUX VOMICA).


L'agitation anxieuse, la précipitation, les phobies évoquent LUESINUM, complémentaire diathésique auquel il faut penser lorsque ARGENTUM NITRICUM,  malgré la présence de ses signes, semble ne pas susciter une réaction favorable.  La symptomatologie buccale le rapproche de NITRI ACID., comme cela a déjà été souligné.


Mais le plus menaçant est la mise en oeuvre simultanée des modes réactionnels luétique et tuberculinique.  Chez l'enfant répondant à ces deux modes, la minéralisation des dents est menacée et il est souvent nécessaire d'alterner ce remède avec NATRUM MURIATICUM. Chez l'adulte, on peut hésiter avec IODUM.

Enfin, il faut évoquer un problème d'actualité, celui des risques potentiels d'intoxication par les métaux utilisés en bouche.  Notamment les amalgames d'argent.  Habituellement, les sels métalliques produits par l'électrogalvanisme buccal sont rapidement éliminés et ne présentent pas de danger.  Sauf dans certaines circonstances par exagération de la sensibilité aux sels métalliques.  Le mercure est certainement plus pathogène que l’argent et MERCURIUS SOLUBILIS peut être indiqué pour favoriser l'élimination de sels de mercure fixés dans l'organisme et non éliminés spontanément.  L'argent est le second composant important des amalgames et peut donc participer aux intoxications.  ARGENTUM NITRICUM, bien plus souvent qu'ARGENTUM METALLICUM, peut donc être parfois indiqué pour une neutralisation étiologique.  On rencontre ces problèmes chez des sujets plutôt décompensés.  ARGENTUM NITRICUM se voit surtout chez des sujets amaigris, surmenés sur le plan physique et mental, avec l’atteinte du comportement que l'on connaît.

Commentaire

d'Alain HORVILLEUR