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Note = ce texte de Michel Guillaume fait partie d'un ensemble de 16 cours élémentaires d'homéopathie, publié en 1967 par les Editions Coquemard, sous l'égide de l'Institut National Homéopathique Français (I.N.H.F.). On peut constater qu'il n'a pas pris une seule ride !


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            L'éventualité d'une aggravation au cours d'un traitement homéopathique pose des problèmes aussi bien au praticien débutant qu'au médecin homéopathe chevronné.


            En réalité, ces aggravations peuvent être réduites à quelques cas simples et la conduite à tenir dans chaque cas est généralement claire avec un peu de réflexion.


            Nous envisagerons d'abord l'aspect pratique de ces aggravations et nous donnerons ensuite quelques notions théoriques utiles à connaître.


ASPECT PRATIQUE DES AGGRAVATIONS


            Lorsqu'un malade se présente à votre consultation se plaignant d'être aggravé, il convient de l'interroger et de l'examiner avec le plus grand soin.


A   –    CET EXAMEN EN EFFET DEVRA D'ABORD RÉPONDRE AUX QUESTIONS ÉLIMINATOIRES SUIVANTES:

  

  1. Le remède a-t-il été bien choisi ?  On peut s'être tout simplement trompé dans sa première prescription. Il faut s'astreindre à rechercher la totalité des signes présents lors du premier examen et voir a posteriori si le remède "collait bien".

  

  1. Y a-t-il des circonstances extérieures qui ont aggravé la maladie malgré un traitement apparemment correct ? Cas de la prolongation d'une intoxication professionnelle, d'un régime alimentaire aberrant, d'alcoolisme et de tabagisme, ou du surmenage persistant, souvent d'ailleurs plus ou moins inconscient (ce dernier point nous est apparu comme particulièrement fréquent. Il n'est pas rare que quelques jours de repos permettent au remède d'agir de façon très rapide).


            Ces causes d'insuccès sont évidentes… sur le papier ! Il faut souvent les rechercher dans la pratique.


B   -     LE REMEDE SEMBLE AVOIR ETE BIEN CHOISI, AUCUNE CAUSE EXTERIEURE AGGRAVANT N4A ETE RETENUE.


            C'est alors qu'il faut déterminer à quelle variété d'aggravation nous avons affaire. Nous les classerons en deux grands groupes : les aggravations superficielles et les aggravations profondes.


I/ Les aggravations superficielles:


            En interrogeant soigneusement le malade, il s'avère que quelques symptômes sont exagérés, de nouveaux même ont pu apparaître, d'autres par contre se sont améliorés. Mais l'état général n'est pas détérioré. Il peut même être meilleur, le malade se disant plus résistant ou son teint est nettoyé, plus clair, son regard plus vivant, etc.....


            Nous nous sommes adressé au bon remède, mais:

  

  1. La dilution est mal choisie.

  2. La posologie est trop rapprochée.

  3. Le traitement est trop prolongé.

  4. Le remède "simillimum" d'action profonde qui a été donné aurait dû être précédé d'un "drainage" convenable.      

  

LES AGGRAVATIONS MEDICAMENTEUSES

EN HOMEOPATHIE



Docteur Michel GUILLAUME

(1921-2014)

En fait, on voit souvent ces erreurs vénielles s'associer. Voici quelques exemples.


è  Garçon de 17 mois, gros, gras, criard et rouge, présentant un eczéma croûteux du visage. C'est un goinfre, un coléreux et il a une particulière horreur des bains. Sa langue est saburrale. Antimonium crudum 9 CH (voir sa matière médicale dans un ouvrage) 3 doses à 8 jours d'intervalle. Exacerbation de 3 jours après la première dose, puis amélioration. Nouvelle exacerbation durable à la deuxième dose, que la troisième aggrave encore, avec apparition de constipation faite de selles grosses.


E Critique: il aurait fallu, suivant le conseil d'Hahnemann, attendre la fin de l'amélioration due à la première dose, avant d'administrer à nouveau le remède.


E Ce qu'il faut faire: attendre le retour au statu quo ante puis changer de dilution. Si l'aggravation persiste = donner un antidote, choisi d'après les nouveaux symptômes. Dans l'observation présente, ce fut Graphites sur le nouvel aspect de l'éruption et la constipation.


è Homme de 32 ans, atteint de gastrite. Irritabilité, tristesse avec besoin de solitude et idées de suicide. Pesanteurs et vides stomacaux, ballonnements post-prandiaux avec somnolence. Constipation avec faux besoins.


Nux vomica 7 CH + Sepia 7 CH alternés tous les soirs, Condurango + Angelica archan 3 CH, 5 gouttes avant les deux repas (remèdes organotropiques sur l'estomac).


Le malade revient au bout de 3 semaines avec une constipation opiniâtre et de l'insomnie, l'état dyspeptique est inchangé.


E Critique: remèdes trop rapprochés pour le cas considéré (certains malades sont plus sensibles que d'autres). Les dilutions sont peut-être mal choisies.


E Ce qu'il faut faire: changer le rythme des prises et la dilution. Après 8 jours sans aucun traitement: Nux vomica 12 CH en doses hebdomadaires et Sepia 5 CH quotidien lui réussissent ultérieurement beaucoup mieux.


è Femme de 63 ans, obèse, à peau verruqueuse, épaisse, luisante et grasse, présentant du catarrhe nasal postérieur, un polype nasal gauche obstructif, une hypertension à 23-14 avec bouffées congestives, intolérance à la constriction, à la chaleur, au contact, tendance loquace et fragilité capillaire. Antécédents d'infection génitale terminée par une hystérectomie totale à 31 ans. Expression creusée, teint terreux.


Traitement sur deux plans: plan des symptômes circulatoires => Lachesis 7 CH + Arnica 5 CH, alternés un jour l'un un jour l'autre.  Hypertension congestive => Aurum metallicum 9 CH, 2 granules 2 fois par semaine. Terrain dont le remède est ici => Thuya 9 CH, 4 doses à 15 jours d'intervalle.


Au bout de 5 semaines = fatiguée par le traitement, dormirait tout le temps, douleurs au foie qui est nettement hypertrophié et sensible, tension artérielle à 26-15. Par contre, le teint est nettoyé, l'expression détendue, les bouffées ont nettement diminué, le polype a dégonflé de moitié.


E Critique: Thuya remède d'action profonde sur l'ensemble des troubles de cette malade a été donné trop tôt. On n'a pas prêté assez d'attention à ses émonctoires, notamment hépatique. Le foie s'est en effet montré insuffisant devant une chasse toxinique provoquée.


E Ce qu'il faut faire: aider les émonctoires (ici hépatique) et les appareils surmenés (ici circulatoire). Le traitement fut = Natrum sulfuricum 9 CH 2 doses à 15 jours d'intervalle, remède choisi sur les signes généraux (voir une matière médicale) et sur les signes locaux présents ici = tendance à la diarrhée après le petit déjeuner, douleur d'élancements du foie pire couché à gauche et Solidago 3 CH, bon remède de drainage du foie hypertrophié et sensible chez les obèses. Aurum metallicum et Arnica furent continués. L'amélioration fut générale et sans à-coups.


II/  Les aggravations profondes:


            Ces aggravations sont rares, généralement réversibles si l'on arrête à temps. "Il ne faut pas s'hypnotiser sur elles" (Dr H. Voisin). Mais il faut les connaître pour les combattre.


            Ce sont celles qui touchent réellement l'état général du patient, ce qui apparaît à un examen complet.


            Doivent être appréciés en particulier:

  

  1. Les signes subjectifs, au premier rang desquels nous n'hésiterons pas à mettre des symptômes psychiques => le malade "se sent décliner", devient pessimiste, triste, perd le goût de vivre. Ou bien sa résistance physique à la fatigue s'amoindrit, son appétit s'altère, il s'essouffle, il maigrit alors qu'il n'avait déjà pas son poids normal.

  

  1. Les signes objectifs: le teint devient pâle, ou jaunâtre, ou terreux, ou brouillé, le regard s'éteint.

  

  1. Sans parler de l'aggravation des signes objectifs antérieurement constatés: généralisation d'un eczéma, creusement d'un ulcère, diffusion d'une suppuration, etc...

  

  1. Sans parler des coups d'accélération donnés à une maladie caractérisée, comme une tuberculose pulmonaire traitée intempestivement par Phosphorus, ou une néphrite chronique par des dilutions élevées et rapprochées de Lycopodium.


            Ces aggravations profondes posent des problèmes plus ou moins aisés et doivent être soumis à une critique soigneuse.

  

  

  

  

  


            En voici un exemple:


è Une femme de 46 ans présente, à la suite d'une situation de famille douloureuse et irrémédiable, une névralgie cervico-brachiale bilatérale avec intrication psychosomatique évidente. Le psychisme à base d'indifférence épuisée, l'aspect du visage, la sensation de vide cérébral, la céphalée postérieure avec obnubilation, la faiblesse et la diarrhée chronique forment chez cette phosphorique un tableau exact de Phosphoricum acidum. Une dose en 12 CH donnée un matin est suivie d'une pseudo guérison totale de 24 heures suivie d'une rechute au statu quo ante. Une autre dose en 12 CH donnée 8 jours après est suivie d'une aggravation de la dépression de plusieurs semaines (sans changement des douleurs) qui confine la malade au lit, puis en maison de santé. Ce n'est  qu'au bout de plusieurs mois de traitement classique et de repos que la névralgie cervico-brachiale a pu être traitée pour son propre compte. Picric acidum, puis Calcarea phosphorica formèrent le fond du traitement qui, cette fois, fut lentement curateur.


E Ce qu'il faut faire: dans ces cas de vitalité trop faible ou de dépression nerveuse trop accentuée, il faut tâter très soigneusement la susceptibilité des malades à leur simillimum apparent en commençant par des dilutions faibles (par exemple 5 CH, une seule fois 2 granules et savoir attendre jusqu'à 3 jours la réaction). On ne sera autorisé à élever la dilution qu'en cas de réaction nulle ou insuffisamment favorable.


            Si la réaction est défavorable, ou même nulle à des dilutions variées, on s'adressera aux remèdes dits de "manque de réaction", choisis selon une similitude aussi approchée que possible, notamment = Psorinum, Ammonium carbonicum, Carbo vegetabilis, Laurocerasus, Sulfur, avec les mêmes précautions de posologie

III/ Autres types d'aggravations moins fréquemment rencontrées.

  

  1. L'amélioration a été locale, mais d'autres symptômes les ont remplacés au niveau d'un appareil essentiel. Exemples:

  


E Ce qu'il faut faire: il fait arrêter immédiatement le traitement en cours, chercher le nouveau simillimum en s'aidant au besoin de remèdes indiqués dans les ouvrages d'homéopathie, comme antidotes des premiers.

  

  1. Reste le cas exceptionnel des malades intolérants à l'homéopathie.

  

  


            Il semble, après 2 ou 3 cas que nous avons pu suivre et améliorer, que c'est à la dynamisation que ces malades sont intolérants, ainsi qu'à l'administration par voie interne.


            Il y a lieu d'essayer l'administration externe de teinture-mère ou de substance en compresses sur la région où les symptômes se manifestent.


QUELQUES NOTIONS THEORIQUES A CONNAÎTRE

  

  1. Au cours du traitement homéopathique d'un état chronique, certaines évolutions montrent qu'on est dans la bonne voie. Il en est ainsi notamment:

  

  

  

  

  1. Des manifestations en sens inverse doivent au contraire être interprétées comme des symptômes d'aggravation.


Bibliographie:


Hahnemann = "Organon", 6° édition, §§ 157 à 171


J. HUI BON HOA: "Précis de technique répertoriale homéopathique de Kent", pp 54 à 57


H. VOISIN: "L'application rationnelle et critique de l'homéopathie", pp. 149 à 161


            On peut reconnaître ci-dessous à droite le Docteur Michel GUILLAUME. Il s'agissait alors, en juillet 1982, de préparer le programme d'enseignement de l'Ecole de Paris de l'I.N.H.F. pour l'année en cours.

  

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