Accueil
page
page
Accueil

HISTOIRES DE GINGIVITES (fin)

1/  L’orientation psorique ou psoro-sycotique :


GRAPHITES :


            Ce minéral  se trouve indiqué lorsque les émonctoires de suppléance ne suffisent plus = blocage des émonctoires :


  


            Ce patient est devenu frileux, plus ou moins obèse, déprimé (pleure pour un rien ou en écoutant de la musique) et surtout il voit des troubles cutanés alterner avec d’autres troubles, dont la gingivite ulcéro-nécrotique. Une tendance au ralentissement métabolique s’affirme (mode sycotique) avec hypothyroïdie.


            Cette gingivite évolue progressivement vers une véritable maladie parodontale = « Les gencives se rétractent, les dents brûlent et piquent...deviennent branlantes... ».


            Tous les troubles de GRAPHITES apparaissent et évoluent progressivement, lentement, laissant une possibilité préventive à condition que le patient vienne consulter en temps utile et qu’en cette occasion son indication n’échappe pas à la vigilance d’un dentiste homéopathe.



NATRUM SULFURICUM :


            Ce médicament, lorsqu’il se trouve indiqué, exprime une mise en œuvre du mode sycotique. On retrouve dans le contexte du patient les facteurs de déclenchement de ce mode réactionnel = d’abord l’humidité sous toutes ses formes et notamment le froid humide - puis éventuellement un traumatisme crânien qui perturbe le fonctionnement des centres régulateurs du métabolisme de l’eau (sycose hydrogénoïde avec imbibition hydrique) - puis certains médicaments qui dépriment le système immunitaire comme les corticoïdes.


            Ce qui domine ce sont le ralentissement métabolique et l’imbibition hydrique avec leurs retentissements à différents niveaux et notamment sur le système immunitaire, ce qui peut expliquer la torpidité des réactions inflammatoires avec des écoulements épais, jaune-verdâtres (rhino-pharyngés, bronchiques, génito-urinaires...), en particulier mais non exclusivement au niveau de la gencive et du parodonte. Le mode sycotique explique en outre l’apparition de verrues, de condylomes et de toutes sortes de tumeurs bénignes. Il ne faut pas oublier les troubles articulaires influencés par le froid humide = enraidissement, craquements (dont A.T.M.), aggravation aux premiers mouvements et amélioration par le mouvement continué (Rhus tox.). Les troubles digestifs évoquent ceux de GRAPHITES = flatulence avec coliques et diarrhée (ici pires après le petit déjeuner), congestion hépatique douloureuse, dyskinésie biliaire, alternance de diarrhée et de constipation (selles dures, noueuses, volumineuses). Enfin, la tendance dépressive est manifeste chez ce patient devenu obèse et frileux = dépression et tristesse accentuées par froid humide, pleurs par la musique, irritabilité pire au lever mais mieux après la selle.


            Les troubles bucco-dentaires reflètent l’atteinte générale qui, rappelons-le, est progressive. Il y a d’abord une sensibilité des dents, voire des névralgies dentaires déclenchées et aggravées par temps froid et humide (Dulcamara, Aranea diadema, Rhododendron, Rhus tox., etc...). Puis on constate des aphtes, des sensations de brûlure : « les gencives brûlent comme du feu, elles sont rouges, ulcérées » (Lathoud). On retrouve des éruptions vésiculeuses brûlantes autour de la bouche (sans l’exsudat épais de Graphites ou de Antimonium crudum). Et surtout, la gingivite ulcéro-nécrotique apparaît progressivement avec développement d’une maladie parodontale : « Rétractions des gencives, déchaussement des dents, les dents deviennent branlantes et tombent facilement... » (Lathoud et Kent).


            Inutile de rappeler ici encore que ces troubles apparaissent lentement, qu’il peut se passer des années entre une banale aphtose et une maladie parodontale mais que dès le début le patient est devenu particulièrement sensible au froid humide et que ce fait est une véritable sonnette d’alarme pour un médecin ou dentiste homéopathes.

2/  L’orientation psore  => tuberculinisme :


            Encore une fois, il y a sans doute un facteur héréditaire qui explique qu’un sujet du type Lycopodium évolue vers des médicaments du mode tuberculinique. Le point de cette évolution reste l’atteinte de la fonction hépatique. Avec Graphites ou Natrum sulfuricum, le sujet voit son métabolisme se ralentir et apparaître une tendance à l’obésité. Cette évolution est fréquente = elle est tardive chez un normoligne qui suit plus ou moins longtemps un régime de vie adaptée à ses besoins. Elle est précoce chez un bréviligne qui a dès le départ un métabolisme ralenti (c’est justement pour cette raison qu’il est bréviligne) et qui est donc particulièrement sensible aux facteurs de ralentissement que représente l’auto-intoxication chronique.


            La mise en œuvre du mode tuberculinique chez un sujet Lycopodium peut s’expliquer par la conjonction de plusieurs facteurs déclenchants. Il y a certes le facteur héréditaire. Puis quelques circonstances telles que = le surmenage intellectuel, des problèmes psychogènes (chagrins, deuil, déception sentimentale, etc...),  et souvent des erreurs diététiques comme les régimes amaigrissants mal conduits, aboutissant à des carences minérales, elles-mêmes pouvant expliquer des troubles du métabolisme de l’eau avec déshydratation des muqueuses. Plusieurs médicaments sont alors évoquer, le trait commun entre eux étant l’insuffisance hépatique. La dyspepsie flatulente que l’on avait avec graphites ou Natrum sulfuricum, devient ici une dyspepsie avec dénutrition. Le patient se met à maigrir, aboutissant au tableau classique d’un Lycopodium aux traits maladifs, avec une maigreur de tout le corps sauf l’abdomen.


            La dénutrition, l’amaigrissement et la déshydratation des muqueuses évoquent à coup sûr NATRUM MURIATICUM.


NATRUM MURIATICUM :


            Il se trouve indiqué chez ce sujet Lycopodium disons d’une manière occasionnelle, due aux circonstances.



            Lycopodium et Natrum muriaticum se confient peu à leur praticien. Le premier est devenu triste, déprimé, il doute de plus en plus de lui-même, il apparaît de plus en plus comme un misanthrope désabusé mais on sait qu’il cache par un comportement autoritaire, cassant, parfois méprisant, un besoin d’affection qu’il ressent comme une faiblesse indigne de lui. Natrum muriaticum est un autre introverti, triste, découragé, agité, irritable, intolérant à la contradiction, ayant besoin de solitude pour ressasser ses peines et ses problèmes. Il n’accepte pas la consolation qui l’exaspère.


            Tous deux ont des problèmes digestifs = appétit capricieux, lorsqu’il est augmenté, le sujet a soif et désire des mets salés, a une aversion pour le pain et les aliments gras. Sa constipation s’accentue par sécheresse intestinale avec des problèmes à la défécation par sécheresse de la muqueuse anale. Sur ce fond, il y a une diarrhée matinale avec parfois des selles involontaires.


            La bouche des deux patients est sèche, mais Natrum mur. a une soif fréquente et importante (cela se produit lorsqu’il y a déshydratation des muqueuses, donc par périodes), alors que la soif n’est pas un trait important de Lycopodium.. Tous deux ont des gingivorragies, des poussées d’herpès labial, des aphtes. La gencive est souvent enflammée, ulcérée, celle de Natrum muriaticum offre parfois l’aspect d’une gingivite scorbutique.


            Malgré les nombreuses similitudes, il y a tout de même de grandes différences, qui ne sautent pas toujours aux yeux lors de la consultation mais qui apparaissent lors de la répertorisation. De plus, il y a dans Natrum muriaticum de nombreux signes qui annoncent le médicament suivant = SEPIA.


L’aggravation de la congestion veineuse conduit à SEPIA :


            L’indication de SEPIA survient au cours de la décompensation d’un sujet psorique, ancien Sulfur, plus récemment Lycopodium, qui a poursuivi son mode de vie défavorable, notamment sur le plan hygiéno-diététique et pour peu que surviennent en plus quelques facteurs psychogènes : contrariétés répétées, déceptions, chagrins, stress, le tout aboutissant à une dépression physique et mentale.  C’est l’évolution psorique LYCOPODIUM è SEPIA. Chez ce dernier, on retrouve encore des caractéristiques typiquement psoriques =  alternances de troubles cutanés et  muqueux (dont la gingivite). Les troubles digestifs sont encore très importants = dyspepsie hyposthénique avec dyskinésies biliaires, constipation avec exonérations insuffisantes, hémorroïdes prolabées, migraines digestives, difficultés de digestion avec désir d’aliments épicées pour la stimuler, etc... La congestion veineuse résultant des difficultés éliminatoires se concentre surtout au niveau du petit bassin et concerne aussi bien le système porte (hémorroïdes) que le système cave (varices).  On trouve également dans SEPIA une tendance au relâchement des fibres élastiques expliquant des ptôses. Il en résulte = une sensation de vide au creux épigastrique non améliorée en mangeant parce que due à une ptôse gastrique - sensation de pesanteur dans le bas ventre ou de boule pesante dans le rectum, pire au moment des règles.


            La ménopause est une période propice à l’apparition de l’indication de SEPIA,  c’est alors l’occasion du développement d’une pathologie bucco-dentaire. Mais il ne faut pas oublier l’aggravation au moment des règles depuis la puberté jusqu’à la ménopause (herpès labial ou génital cataménial ou gingivorragies par exemple).


            L’indication de SEPIA peut se voir également chez un tuberculinique du type NATRUM MURIATICUM et qui évolue vers SEPIA par aggravation et concentration de la congestion veineuse au niveau du petit bassin. Il faut rappeler que PULSATILLA correspond à une congestion veineuse plus générale, expliquant entre autres la thermophobie et la grande variabilité des troubles qui tendent à la fixation avec SEPIA. C’est ce que l’on peut constater au niveau bucco-dentaire = la gingivite de PULSATILLA est facilement réversible, alors que celle de SEPIA évolue vers une véritable maladie parodontale.


            Enfin, il faut rappeler que lors d’une décompensation, il est fréquent que l’organisme mette en œuvre plusieurs modes réactionnels. SEPIA peut se trouver indiqué lors de l’aggravation d’un processus psorique ou tuberculinique = le trait commun est la congestion veineuse du petit bassin. Mais, cette dernière en ralentissant la circulation veineuse favorise les infections urinaires et génitales, notamment les mycoses vaginales qui prennent l’allure sycotique = torpides, récidivantes, chroniques (THUYA ou PSORINUM).


            Le comportement psychique évoque celui de NATRUM MUR. avec sa dépression, sa lassitude, son besoin d’isolement, son détachement des êtres proches, son aggravation par la consolation, son apathie et son indifférence pour tout et pour tous.


            Ainsi, l’histoire de la gingivite de SEPIA peut appartenir à plusieurs scénarios. Déjà, HAHNEMANN avait noter les gingivorragies « sans cause », elles ne sont en fait que la traduction buccale de la congestion veineuse. Celle-ci ralentit la circulation veineuse et notamment au niveau des incisives inférieures = tartre, ulcération, puis alvéolyse, mobilité et poches parodontales. Progressivement, toutes les autres dents sont atteintes. Il faut signaler également une tendance aux caries dentaires, sans doute plus fréquentes chez les tuberculiniques et plusieurs auteurs soulignent la rapidité de l’évolution des caries, que l’on trouve également dans NATRUM MURIATICUM.


            Avec LACHESIS et SEPIA, nous possédons deux grands médicaments de gingivite ou de parodontopathie chez la femme ménopausée, qui font merveille à condition de les donner précocement.

 

Alain HORVILLEUR

Portrait

 de LACHESIS

Portrait

de SEPIA

Une autre histoire de gingivites = MERCURIUS SOLUBILIS


         La gingivo-stomatite est constante dans toutes les formes d’intoxication par le mercure. C’est ce qui explique sans doute sa prescription quasi systématique par certains praticiens ou par de nombreux patients qui ont recours à l’auto-médication. Comme toujours en homéopathie, il n’y a pas de succès sans respect du principe de similitude. Et MERCURIUS apparaît plus complexe que ne le laisse supposer sa toxicologie.


            Le mercure est toxique pour tout le monde, quel que soit le type sensible morphologique. Aussi est-il difficile de décrire un seul type de patients répondant à ce médicament. Voici d’abord quelques signes caractéristiques de MERCURIUS qu’il est nécessaire de retrouver chez n’importe quel patient pour justifier sa prescription.


Suites de = FROID HUMIDE - suppressions = condylomes, coryza, écoulement, éruption, transpiration.... - Vaccinations - traumatisme crânien...


Instabilité mentale avec agitation anxieuse (sommeil agité, angoisses, mauvaise humeur), besoin de remuer et de changement. On retrouve les deux phases successives de l’action de tout toxique = excitation avec comportement hâtif et précipité puis dépression avec anxiété, obsessions, lenteur intellectuel (confinant parfois à l’idiotie).


Propension aux inflammations aiguës ou chroniques des muqueuses et de la peau avec tendance aux ulcérations (superficielles et phagédéniques) et à la suppuration . Augmentation des sécrétions et excrétions, qui sont de plus de mauvaise odeur. Tendance aux hypertrophies ganglionnaires, soit satellites, soit autonomes, dont les amygdales très important remède de rhino-pharyngites).


Douleurs osseuses nocturnes, brûlantes dans les tibias ; douleurs périostées lancinantes ou déchirantes - tendance aux ostéites avec nécrose et suppuration (pus verdâtre), notamment des os de la face et du nez (ozène). Tendance aux exostoses du crâne.


Frisolité avec aggravation par le froid humide (facteur étiologique très fréquent), intolérance à la chaleur (du lit, d’une chambre, d’une boisson, etc...). Aggravation par les températures extrêmes. Aggravation nocturne. Sueurs nocturnes qui ne soulagent pas.


La bouche :

  


            Voilà donc un ensemble de signes qui caractérisent MERCURIUS SOLUBILIS. On peut comprendre son importance dans le traitement de la gingivite ulcéro-nécrotique, bien qu’il ne soit pas le seul.

                        

            Cependant, l’histoire de la gingivite de MERCURIUS peut s’inscrire dans plusieurs scénarios. Par comparaison avec le cinéma, il est très fréquent de voir la même scène se dérouler dans des histoires différentes. Il en est de même pour la gingivite en elle-même et pour MERCURIUS en particulier.



Le scénario le plus « classique » = une histoire de luétique.


            Mercurius solubilis a été longtemps et reste encore un médicament de la syphilis. Il est sans doute l’un des plus importants du mode réactionnel luétique, par similitude. Mais il est très souvent associé à d’autres modes réactionnels.


            On retrouve dans les antécédents familiaux du patient parfois une syphilis de l’un des parents, ou l’éthylisme de l’un des deux ou des deux, des fausses couches répétées ou un accouchement prématuré, ou encore des différences morphologiques dans la fratrie. Dans les antécédents personnels on trouve des rhino-pharyngites à répétition par temps froid et humide, des hypertrophies ganglionnaires dont les amygdales, des vomissements répétés dans l’enfance, ou des convulsions avant le 6° mois...


         Bien entendu, on retrouve les signes bucco-dentaires de MERCURIUS, puis les signes psychiques et généraux, ensemble qui justifie sa prescription. Il arrive souvent que l’état aigu soit traité par MERCURIUS CORROSIVUS et le traitement de fond par MERCURIUS SOLUBILIS.


            Mais le plus souvent, l’indication de MERCURIUS n’apparaît pas dans des manifestations luétiques isolées, mais plutôt dans des états polydiathésiques.

Chez l’enfant :


            Il existe deux types d’enfants MERCURIUS, selon R. ZISSU = l’un « gras » chez lequel se même d’abord le mode psorique, puis sycotique et enfin luétique - l’autre « maigre », déminéralisé, chez lequel coexiste le mode tuberculinique et le mode luétique.


            Le type gras s’explique par la présence de signes communs à CALCAREA CARBONICA et à MERCURIUS = lymphatisme de fond avec engorgement et hypertrophie des formations lymphoïdes, la sensibilité au froid humide qui déclenche et aggrave de nombreux troubles dont la rhino-pharyngite. Il y a sans doute une note héréditaire pour expliquer la mise en œuvre du mode luétique. Mais l’enfant plutôt indolent, apathique  et lent devient agité, instable, de mauvaise humeur. La peau déjà malsaine avec des sueurs localisées (tête notamment) voit des sueurs nocturnes malodorantes et laissant mal à l’aise. A l’intolérance au froid humide s’ajoute et se renforce une aggravation par la chaleur. Il y a peu de signes bucco-dentaires dans CALCAREA CARBONICA, alors que ceux-ci se développent avec MERCURIUS, pouvant donner le tableau, certes devenu rare aujourd’hui, d’une parodontite juvénile, parfois grave. Dans les formes moins graves, on trouve la gingivite ulcéreuse ou ulcéro-nécrotique et la tendance aux suppurations d’origine dentaire.


            Il est intéressant de souligner que CALCAREA CARBONICA réagit d’abord sur le mode psorique, qu’il a donc besoin d’éliminations. Or celle-ci peuvent être contrariées et le mode sycotique est alors sollicité. Et curieusement, on trouve parmi les signes étiologiques de MERCURIUS, à côté de ceux du mode luétique, la suppression des éliminations (circonstances du mode psorique) et deux causes du mode sycotique = les mauvais effets des vaccinations et le traumatisme crânien.   


            Le type maigre est plus menacé au niveau de ses dents. Il y a chez cet enfant conjonction de la mise en œuvre du mode tuberculinique avec son cortège de troubles minéraux aboutissant à ce que l’on appelait autrefois la « scrofule », avec anémie, fatigabilité, congestion veineuse. Le luétisme ajoute son atteinte particulière des formations lymphoïdes, dont les amygdales, son instabilité mentale avec agitation anxieuse, sa tendance aux excrétions et sécrétions fétides, aux ulcérations et aux suppurations, l’aggravation nocturnes... La gingivite est alors fréquente et beaucoup plus grave que lorsque le mode luétique n’est pas sollicité. C’est sans doute chez ce type d’enfant que l’on retrouve la tendance aux caries dentaires, au degré fort dans le répertoire de KENT.


Chez l’adulte :


            On peut voir souvent MERCURIUS SOLUBILIS apparaître chez un sujet ayant longtemps réagi sur le mode psorique, répondant à SULFUR, mais parvenu à un stade de décompensation avancé. L’explication provient souvent des troubles hépato-digestifs à la suite d’un mode de vie mal adapté. On sait que dans le mode psorique, les ennuis arrivent avec une atteinte hépatique acquise. Or le mercure est un toxique pour le foie = foie hypertrophié, sensible au toucher, douloureux. On trouve dans Mercurius une répugnance pour la viande, pour les aliments gras, pour le café, pour les sucreries, pour le vin, tous aliments dont le sédentaire psorique a longtemps abusé. L’alcoolisme est l’une des causes de la mise en œuvre du mode luétique. Dans tous ces états digestifs, on pense à NUX VOMICA qui a été longtemps utile, ou à LYCOPODIUM lui aussi longtemps prescrit avec succès puis sans effet. MERCURIUS apparaît alors avec les signes suivants = digestion difficile, renvois, régurgitations rances, nausées, brûlures épigastriques ou gastriques, ballonnement douloureux, crises de diarrhée (pouvant prendre une forme dysentériforme). Et progressivement une insuffisance biliaire apparaît et s’accentue avec lithiase et même dégénérescence hépatique.


            Dans le même temps, la pathologie bucco-dentaire se développe, traitée un temps par NUX VOMICA ou LYCOPODIUM, puis par MERCURIUS lorsque ses signes apparaissent avec leurs caractéristiques propres.


            Un autre fait mérite citation = MERCURIUS est un gros toxique du rein et l’insuffisance rénale est l’une de ses conséquences, dont on connaît les effets bucco-dentaires, comme la maladie parodontale. Il est bien évident que la chirurgie parodontale ne sera pas tentée chez ce patient. L’homéopathie est alors un recours du fait de l’absence d’effets toxiques sur le rein. Mais le résultat est incertain.

  

Un « copain » de MERCURIUS  => NITRI ACIDUM


            Logiquement, NITRI ACID. s’adresse à des états graves, aussi bien sur le plan général que bucco-dentaire. Mais heureusement, on rencontre des formes cliniques moins « avancées ». L’élément « acide » explique la gravité des ulcérations = profondes, à bords irréguliers et tourmentés, à fond saignant, sanieux et parfois bourgeonnant, suintement d’un écoulement corrosif et fétide, sensation d’écharde ou douleur rongeante comme par un acide ( !), tendance phagédénique. L’acide nitrique a une prédilection pour les orifices, ce qui rappelle SULFUR.


            NITRI ACID. se situe dans la série luétique mais s’y ajoute la déminéralisation et la cachexie d’origine tuberculinique. Le patient au stade aigu est faible, très déprimé moralement, amaigri et émacié, irritable et coléreux à la moindre contrariété, anxieux pour sa santé, facilement vindicatif, rancunier, têtu. Il ne supporte pas grand chose = toucher, bruits, secousses, etc...


            La décompensation survient après un surmenage physique ou moral, ou après des insomnies prolongées, ou des troubles de la nutrition. Il est frileux et aggravé par le froid, par les changements de temps, mieux par la chaleur modérée. De nombreux troubles surviennent par temps froid et humide. L’aggravation par le froid et l’amélioration de la chaleur, ajoutées au caractère grave des lésions ulcéreuses permet d’évoquer ARSENICUM ALBUM, remède complémentaire dans une évolution défavorable. L’amélioration de nombreux signes lorsqu’il circule en voiture est une modalité fréquente. L’aggravation nocturne est constante, comme chez tous les luétiques.


            Sa bouche reflète son mauvais état général :


Commissures labiales ulcérées, fissurées, craquelées, saignement facile, douleurs piquantes (perlèche de toute nature).

Gencive = enflammée, ulcérée, spongieuse, très hémorragique, donnant parfois un aspect scorbutique. L’atteinte de l’os alvéolaire est fréquente, avec tendance à la suppuration. Le tout donne donc le tableau classique de la gingivite ulcéro-nécrotique évoluant vers une parodontopathie.

Salivation abondante, excoriante, fétide, haleine nauséabonde.

Aphtose buccale grave avec les ulcérations déjà décrites. Lichen, leucoplasie, mycose, muguet.

Langue nette, rouge, humide, avec un sillon central. Langue en « carte de géographie » douloureuse. Ulcérations linguales, notamment aux bords.

Herpès labial (et herpès génital).

Dents cariées, douloureuses la nuit (douleurs battantes ou déchirantes), pendant les règles, au cours de la mastication,< par les températures extrêmes.

Craquements dans les A.T.M.


            Comme souvent dans les états de dénutrition, tous les modes réactionnels se manifestent, comme si l’organisme usait de tous ses moyens pour se défendre. Ainsi, si le mode luétique domine largement, si le mode tuberculinique explique la cachexie, le mode sycotique s’exprime par une tendance aux néoformations = polypes, condylomes génitaux (saignant, sensibles au toucher, sensation d’écharde), verrues pédiculées, molles, en choux-fleurs, saignant facilement au contact. Toutes ces tumeurs siègent électivement au niveau des orifices (anus, paupières, vulve. Les ulcérations se retrouvent au niveau de la peau, surtout à la jonction cutanéo-muqueuse, avec leurs caractères décrits. Il est intéressant de souligner que parmi ses facteurs étiologiques, on retrouve plusieurs suppressions (de condylomes, d’une éruption, d’un coryza, de la transpiration), tous facteurs que l’on trouve aussi dans MERCURIUS et qui rappellent le mode psorique du début.


            L’appareil digestif n’échappe pas à l’action de l’acide nitrique = dyspepsie acide, ulcère gastrique, brûlures et crampes d’estomac, acidité, < par les graisses, > en mangeant, digestion difficile surtout pour le lait et les graisses, désir d’aliments épicés ou indigestes, aversion pour le pain, la viande et les sucreries. Au niveau de l’intestin, on trouve une diarrhée irritante, fétide, excoriante pour l’anus, suivie de ténesme, de douleurs déchirantes ou piquantes pendant plusieurs heures après la selle, avec tendance aux fissures anales très douloureuses (sensation d’écharde), d’hémorroïdes douloureuses et très hémorragiques, etc...


            Comme on peut le constater, NITRI ACID. est un important remède de troubles graves, bucco-dentaires entre autres, soit aigus, mais plus volontiers chroniques. C’est avant tout un remède évolutif dans une décompensation défavorable, qu’il peut stopper. Il convient ensuite de rechercher le remède qui correspond à l’amélioration.



IL FAUT BIEN CONCLURE !



            Cette étude hélas bien incomplète n’avait d’autre prétention que de raconter quelques histoires de gingivites. On pourrait en raconter bien d’autres.


Le fil conducteur a été de montrer que les modes réactionnels chers aux homéopathes permettent d’expliquer les différentes formes cliniques d’une malade somme toute banale. Les « officiels » ont bien compris le rôle du « terrain », mais ils ne disposent pas pour l’instant d’une conception suffisante pour moduler leurs traitements de fond, en complément de ceux  que l’état local impose et nous ne pouvons que saluer les prouesses techniques des parodontologistes, qui ne suffisent pas dans certains cas à éviter la récidive. Tout simplement parce que l’on se contente de corriger ou de supprimer une conséquence locale sans agir sur la cause profonde, méconnue des officiels.


Entre le gingivite ulcéro-nécrotique de SULFUR et de PSORINUM, il se passe du temps, beaucoup de temps et des événements dans la vie du patient, que l’on peut deviner grâce aux conceptions des modes réactionnels et parfois prévenir. Ces mêmes modes réactionnels permettent de comprendre pourquoi une évolution peut prendre un « tournant », pourquoi peut survenir une aggravation que n’expliquent pas les seuls facteurs locaux, qui peuvent d’ailleurs manquer. Dès la première enfance, les modes réactionnels s’expriment entre autres dans la gingivite érythémateuse de la dentition. Et bien plus tard, les différentes formes cliniques de la même gingivite ulcéro-nécrotique rendent compte de la complexité des itinéraires individuels, même si le trait commun reste la maladie gingivale ou parodontale. 


            Au cours de l’année universitaire 1996-1997, nous avons repris l’étude détaillée des modes réactionnels, en précisant notre conception qui se situe dans le sillage de Roland ZISSU et de Michel CONAN-MERIADEC et qui s’éloigne d’une tentation récente de remise en cause entreprise par Denis DEMARQUE, pour lequel nous conservons une grande admiration mais que nous ne suivons pas sur ce « terrain ». Notre contribution personnelle depuis cette dernière décennie a été d’expliquer la pathologie bucco-dentaire en la situant dans les grandes tendances réactionnelles de l’organisme.