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LES ALGIES VASCULAIRES DE LA FACE

A PROPOS D'UN CAS DE "SYNDRÔME DE SLUDER"

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            Les douleurs de la face, d’une manière générale, posent de nombreux problèmes :  d’abord un problème de diagnostic, puis de diagnostic différentiel tant sont variées les formes cliniques, et enfin un problème thérapeutique. L’intrication au niveau de la face ou de la tête des réseaux nerveux et vasculaires explique ces difficultés auxquelles le praticien se trouve confronté.


            La méthodologie homéopathique permet souvent de contourner l’obstacle du diagnostic étiologique ou différentiel dès lors que le patient offre une symptomatologie suffisamment précise, permettant la mise en évidence du médicament « homéopathique » ainsi individualisé. Mais cet avantage ne doit pas inciter à la paresse !


            Ces algies vasculaires de la face étaient appelées autrefois « sympathalgies » ou encore « causalgies faciales ». Le Dictionnaire de médecine Flammarion en donne la définition suivante : « Dénomination réservée à des douleurs craniofaciales latérales, dont le caractère vasculaire est marqué par la pulsatilité de la douleur précédant l’apparition de modifications vasomotrices locales unilatérales (rougeur de la face, injection conjonctivale, larmoiement, écoulement nasal et sensation d’obstruction nasale), souvent avec des crises ou des accès migraineux. Selon la localisation de la douleur (généralement centrée sur la région péri- ou rétro-orbitaire) et les manifestations associées, il a été décrit de nombreux syndromes désignés par un éponyme, une localisation anatomique ou un terme descriptif : érythromélalgie de la face ou érythroposopalgie - syndrome de Charlin - syndrome de Sluder ou du ganglion sphéno-palatin - cluster headache (Harris) - névralgie du nerf vidien, des nerfs pétreux ».


            Dans le mensuel Impact Internat (Septembre 1995), les algies vasculaires de la face sont décrites dans le chapitre des « Céphalées » , sous-chapitre des Migraines.


            L’algie vasculaire de la face concerne le plus souvent un homme jeune (de 10 à 30 ans et 6 hommes pour une seule femme). Il n’existe pas de caractère familial comme pour les migraines et celles-ci concernent plus les femmes que les hommes. Le rapprochement avec la migraine s’explique seulement par l’unilatéralité des troubles et par une vasoconstriction vasculaire initiale multifactorielle, suivie d’une vasodilation très douloureuse. Les troubles vasculaires à l’origine de ces algies permettent la distinction avec les névralgies.

 

            L’algie vasculaire de la face est donc toujours unilatérale et c’est presque toujours le même côté qui est concerné chez le même malade. Le point de départ se situe le plus souvent au niveau d’un œil = péri- ou rétro-orbiculaire, puis la douleur irradie vers la fosse temporale (dite alors douleur en branche de lunettes) et vers la joue = gencive ou dents du maxillaire supérieur. C’est cette dernière localisation qui motive la consultation du chirurgien-dentiste. La clinique est variable = la crise dure de 30 à 180 minutes, elle survient souvent à heure fixe tous les jours par périodes de quelques jours à quelques semaines (3 ou 4 en moyenne). La crise peut se répéter dans la même journée. La cause n’est pas facile à mettre en évidence. Les formes idiopathiques sont de loin les plus courantes et l’on avance quelquefois des lésions de la selle turcique, sans les préciser davantage.

 

S'il existe plusieurs formes cliniques, trois méritent un commentaire, selon le Professeur Pierre TONNELER, dans son livre:


"Abrégé de médecine au cabinet dentaire"  (SNPM 1981)

  1. Le syndrome de Charlin ou du ganglion ciliaire = douleur oculo-nasale (angle interne de l’œil et racine du nez), avec une congestion conjonctivale, un larmoiement, de la photophobie, un blépharospasme, une rhinorrhée unilatérale, des éternuements.

  

  1. Le syndrome de Sluder ou du ganglion sphéno-palatin = douleurs oculaires, orbitaire, nasale (racine du nez), des dents du maxillaire supérieur, avec une conjonctivite, une mydriase, du larmoiement, une sialorrhée, des dysgueuses. La rougeur et la chaleur de la région concernée est constante. La douleur peut irradier vers la nuque ou dans le nez. On décrit également une toux quinteuse ou une dyspnée asthmatiforme associées pendant la crise.

  

  1. Le syndrome du ganglion optique avec des paresthésies pharyngées, des sensations pénibles de chatouillements péritubaires ou de noyau ne pouvant être dégluti.



            Précision anatomique : le ganglion sphénopalatin  appartient au système nerveux végétatif céphalique, il est situé sur le trajet du nerf vidien dans l’arrière-fond de la fosse ptérygo-maxillaire et intervient dans l’innervation de la glande lacrymale et des muqueuses nasales, buccales et pharyngées. Alors que le ganglion ciliaire se trouve  sur la face externe du nerf optique, juste en avant du trou optique et participe à l’innervation du globe oculaire.

Il faut distinguer la maladie de HORTON = migraine récente d’aggravation progressive chez un sujet de plus de 55 ans. La douleur est toujours unilatérale et de topographie temporale. Sur un fond douloureux permanent surviennent des paroxysmes très douloureux, déclenchés par le contact de la région temporale (avec hyperesthésie du cuir chevelu). La douleur peut irradier vers la nuque ou diffuser dans toute l’hémi-face. Elle est associée parfois à des troubles de l’A.T.M.


            Le diagnostic de la maladie de Horton repose sur la présence d’artères temporales indurées, douloureuses (douleur non battante). Des signes généraux sont associés : fièvre, amaigrissement, accélération de la vitesse de sédimentation (> à 80 mm à 1 heure), tableau de pseudo-polyarthrite rhizomélique. La gravité de cette affection repose sur la présence de troubles oculaires : amaurose d’abord transitoire puis définitive. La maladie de Horton constitue une urgence médicale qui exige une corticothérapie immédiate puis d’entretien (1 à 2 mg/Kg/jour de prednisone).




Professeur Bayard T. HORTON

            Le vrai problème pour le praticien est celui du diagnostic différentiel avec une névralgie du trijumeau ou de l’une de ses branches = névralgie intermittente sans troubles objectifs de la sensibilité, appelée « tic de Trousseau » ou « névralgie essentielle de Trousseau », la névralgie faciale dont la cause peut être précisée et supprimée (cause ORL par exemple ou dento-maxillaire).


            P. TONNELIER signale un autre problème auquel il se trouvait confronté très souvent en sa qualité de chef du service de stomatologie dans un hôpital à vocation psychiatrique, celui des psychalgies qui s’observent chez des malades mentaux. Ils reportent des douleurs imaginaires à leur système dentaire. TONNELIER ajoute : « Il faudra au praticien toute sa sagacité pour vérifier minutieusement toutes les dents avec leur parodonte, l’occlusion, les articulations temporo-mandibulaires, les sinus, la gorge, le pharynx et pour refuser, devant l’absence de cause, les extractions et les mutilations demandées par le malade ». Il n’est pas exceptionnel de rencontrer de tels malades en pratique de ville.



Le traitement « classique » :


            Il est relativement bien standardisé. Plusieurs auteurs insistent à justre titre sur la nécessité de bien expliquer la nature de ce syndrome douloureux afin de diminuer l’anxiété et surtout la cancérophobie éventuelle.


La crise est traitée par :


  



Le traitement de fond : similaire à celui de la migraine.


  


  

LE TRAITEMENT HOMÉOPATHIQUE

D'UN CAS DE SYNDROME DE SLUDER



            En août 1996 nous recevons une femme de 31 ans, adressée par un confrère pour le motif suivant : « Lors de l’interrogatoire, il est ressorti que jeune elle a eu des aphtes récidivants pendant des années. A l’arrêt de ces crises s’est développé un syndrome de Sluder... ». Le diagnostic a été posé par un service hospitalier de sa ville après plusieurs mois de tâtonnement. Cette femme décrit  les troubles dont elle souffre depuis 2 ans et demi de la manière suivante :  Au début, il y a des picotements dans l’œil droit (surtout) avec une douleur coupante comme par un couteau, puis la douleur devient battante, la conjonctive devient rouge, la pupille se met en mydriase,  l’œil pleure et il y a parfois un strabisme de l’œil droit. A chaque fois, une rhinorrhée aqueuse apparaît, puis des douleurs dentaires imprécises dans leur nature (mais ces douleurs ont entraîné l’extraction de la 16 car ses racines plongeaient dans le sinus et le praticien pensait que cela était la cause). Pendant la crise, la patiente se met bailler pendant une dizaine de minutes sans pouvoir s’en empêcher. La douleur irradie ensuite dans les cervicales, dans les molaires supérieures, peu de choses la calme sinon le repos assise, tête haute. Enfin, il y a parfois éruption de petits boutons sur la face à droite, surtout autour des paupières.


            Sur le plan général, cette femme supporte bien tous les climats, elle craint seulement la chaleur confinée. Elle ressent une fatigue en coup de pompe vers 10h30, améliorée en mangeant un peu, le plus  souvent un gâteau sec. Elle a un désir d’aliments sucrés, digère bien, mais elle est constipée (elle prend des laxatifs), elle a beaucoup de gaz, pas d’hémorroïdes. Tout cela d’une manière assez modérée. Mais le plus intéressant est que vers 15 ans, elle a eu une acné traitée par des applications externes. Peu après la disparition de cette éruption, elle a souffert de poussées d’aphtes buccaux récidivants jusqu’à l’âge de 26-27 ans. Les aphtes ont disparu spontanément, car tous les traitements classiques n’ont été que symptomatiques. Et c’est quelques semaines plus tard qu’elle a commencé à souffrir d’algies vasculaires de la face. L’interrogatoire précise encore l’absence de troubles génito-urinaires, elle a seulement quelques sciatiques et des craquements articulaires. Pas d’autres problèmes. Elle est habituellement gaie, optimiste, elle se confie facilement. Seulement elle commence à devenir anxieuse par la persistance de ses douleurs et par l’inefficacité des traitements proposés.  Notre prescription a été la suivante, pour deux mois :


  

  1. BELLADONA 5 CH au moment de la crise, à répéter toutes les ½ heures jusqu’à amélioration.         

  1. SULFUR 9 CH une fois par semaine en dehors des crises.


Nous prévenons cette patiente du risque du retour des aphtes ou de l’acné, ce qui s’est effectivement passé. Mais cette fois, elle a eu la sagesse de suivre notre recommandation de ne rien faire d’autre et d’être... patiente ! Avec un recul de 7 mois, les crises douloureuses ne sont pas revenues.


            Le choix de BELLADONA s’est fait sur les signes locaux, celui de SULFUR sur les signes généraux anciens et contemporains. Il est fort probable, sans que l’on puisse apporter d’autre précision étiologique, que l’algie vasculaire était chez cette patiente la conséquence d’un blocage éliminatoire d’abord cutané, acné supprimée par un traitement externe, puis muqueux par disparition spontanée de l’aphtose buccale récidivante et apparition d’une constipation. Il semble que nous sommes là en présence de ce que les homéopathes appellent une métastase morbide qui est l’une des caractéristiques du mode réactionnel psorique. Le retour de troubles anciens est la vérification de l’une des lois de HERING et le gage d’un pronostic favorable. Nous sommes là enfin sur un « terrain » que les homéopathes connaissent bien.


            La similitude repose d’abord sur le phénomène de congestion artérielle localisée, ensuite sur les troubles consécutifs, locaux ici essentiellement mais éventuellement généraux ou psychiques.


            Il faut préciser ou rappeler que si les « Officiels » ont quelques difficultés à préciser le cadre nosologique des algies vasculaires qui sont tantôt classées parmi les migraines, tantôt parmi les névralgies, ils procèdent comme les homéopathes en proposant un traitement symptomatique, ici un ou des antalgiques ou anti-inflammatoires. Il en va de même en homéopathie lorsque le diagnostic précis n’est pas établi entre une névralgie ou une algie vasculaire. La plupart des pathogénésies ont été réalisées au cours du XIX° siècle, elles décrivent seulement les symptômes apparus chronologiquement chez les volontaires sensibles au cours de l’expérimentation, et ce n’est que par la suite que les praticiens ont tenté de les comprendre et  de définir les cadres nosologiques qui s’y rapportent.


Les médicaments homéopathiques susceptibles d’indication dans les algies vasculaires de la face sont très nombreux, malheureusement pour les praticiens car leur tâche n’en est pas facilitée, mais heureusement pour les patients car parmi ce grand nombre il y a de fortes probabilités de trouver celui qui correspond « homéopathiquement » à chacun et qui se montrera vraisemblablement efficace.


            Tout le problème, mais il n’est pas spécifique des algies faciales, est de retrouver quelques symptômes suffisamment précis, caractéristiques à la fois de la maladie du patient telle qu’il l’exprime individuellement et de l’expérimentation pathogénétique. Il est fréquent de remplir plusieurs pages de symptômes lors de l’observation et de « nager » à la fin car aucun élément « solide » n’en ressort. Dans d’autres cas, le médicament « homéopathique » semble évident d’emblée. C’est le cas de l’observation précédente. HAHNEMANN recommandait de ne conserver que les « symptômes frappants, singuliers, extraordinaires et caractéristiques... » (Organon). Mais on n’en trouve pas toujours, à moins que l’on ne sache pas les rechercher !


            Aujourd’hui, l’informatique a bouleversé les données de ce problème grâce à la rapidité. Ceux qui ont un certain âge se souviennent des recherches répertoriales fastidieuses qui demandaient beaucoup de temps, qui exigeaient de dresser des tableaux avec des listes de remèdes. Nous avions à cette époque l’habitude de procéder à cette recherche à temps perdu et d’adresser l’ordonnance par la poste ! Depuis quelques années nous utilisons le programme AIDE-HOMEO en première intention, programme très insuffisant dans sa forme commercialisée mais que l’on peut perfectionner et enrichir sans difficulté (mais avec de la patience et du temps). Ainsi, il est possible de procéder à une première recherche puis de faire varier les paramètres, de recommencer autant de fois que nécessaire. Tout cela en un temps record.


            Parmi les autres médicaments de la crise aiguë, il faut citer: ACONIT, BRYONIA, KALMIA LATIFOLIA, SPIGELLIA ANTHELMIA, SANGUINARIA CANADENSIS, GLONOINUM, VERBASCUM THAPSUS, etc…. sans oublier les grands polychrestes des modes réactionnels impliqués.

 

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