ORTHODONTIE (suite et fin)
L’enfant NATRUM MURIATICUM:
Sur le plan morphologique, cet enfant est incontestablement un longiligne = enfant grand et maigre, voire amaigri, pâle, frileux. Mais son indication ne rend pas compte du mode réactionnel de fond = tuberculinisme ou psore. Il est donc souvent indiqué chez un enfant CALCAREA PHOSPHORICA qui a des problèmes avec ses minéraux du fait de certaines circonstances étiologiques ou encore chez un enfant SULFUR, à la suite des mêmes circonstances étiologiques.
Sur le plan orthodontique:
NATRUM MURIATICUM peut être un remède d’endognathie ayant tendance à l’aggravation, sans doute par perte du tonus des muscles de la face, avec béance antérieure.
Commentaire
d'Alain HORVILLEUR
Comment reconnaître un enfant Natrum muriaticum ?
1/ Le comportement:
Certains pédiatres, notamment homéopathes, accordent de plus en plus d’importance aux incidents de la grossesse pour expliquer l’indication de certains médicaments par la suite chez l’enfant. Un chapitre important est consacré à Natrum muriaticum dans l’ouvrage « L’Homéopathie exactement » (tome II - p. 214), par le Dr Ramon Frendo qui est sans doute psychiatre...
Cet auteur insiste sur l’importance de l’intériorisation des peines, des déceptions, des indignations ou des chagrins par NATRUM MURIATICUM, aussi bien par la femme enceinte que par tous les sujets justiciables de ce médicament. Mais les peines de la maman pendant la grossesse influenceraient son enfant par la suite. Les interprétations apparaissent tout de même pour le moins curieuses. Ainsi, cet auteur affirme « qu’après avoir été le premier objet d’amour, la maman peut devenir le premier objet de haine ». En cas de déception, s’il s’agit d’une petite fille ce serait sa première déception pour une personne du même sexe. S’il s’agit d’un petit garçon, ce serait sa première déception pour une personne du sexe opposé pouvant expliquer bien plus tard une tendance homosexuelle !!! Même chose pour une déception par le père pour une petite fille !!!
En fait, peu familier des interprétations psychanalytiques, nous préférons les explications de J. BARBANCEY. Elle donne de l’intériorisation de Natrum mur. des descriptions parlantes: l’enfant a besoin de s’assurer d’abord qu’il a sa part de tout: affection de sa mère, nourriture, jeux, etc..., après quoi il consent au partage. S’il se persuade d’un « manque », il se replie sur lui-même, s’enferme dans « son univers » (remède possible d’autisme). Mais il garde une cicatrice indélébile, indéracinable, sans exprimer sa peine, sans pouvoir s’en libérer par une colère explosive à la manière de Nux vomica, sans montrer « l’indignation pâle et contenue de Lycopodium »... Il est difficile de résumer ici toutes les composantes du comportement du petit Natrum mur., si complexe. Nous conseillons de lire et de relire les deux tomes de l’ouvrage de cet auteur: « Pratique homéopathique en psychopathologie ».
2/ Les signes cliniques:
Au cabinet dentaire, on reconnaît l’enfant Natrum mur. à la présence de plusieurs signes suivants:
Tendance à l’amaigrissement malgré un appétit souvent augmenté. Par périodes: désir de sel ou d’aliments salés avec soif importante.
Tendance à prendre froid, frilosité avec intolérance à la chaleur = coryza, rhinites, toux, asthme (le tout avec alternance de sécheresse et d’écoulement muqueux).
Tendance à la sécheresse des muqueuses: lèvres sèches et fendillées, bouche sèche, souvent avec accumulation de salive (c’est la muqueuse buccale qui se déshydrate, pas les glandes salivaires), constipation avec selles sèches et dures...
Tendance aux éruptions cutanées dont le fameux herpès labial.
Tendance à l’asthénie physique et intellectuel: douleurs lombaires, points de côté, céphalées battantes, éréthisme cardio-vasculaire, après efforts physiques ou travail mental intense.
Tendance à l’anémie.
Tendance à la dépression mentale avec repli sur soi, besoin de solitude pour ressasser ses problèmes, < par la consolation, chagrin sans pleurs (du moins en public), etc...
3/ Sur le plan bucco-dentaire:
·
Sécheresse buccale avec soif, lèvres sèches et fendillées.
Gingivite pouvant aller jusqu’à un aspect scorbutique avec gingivorragies.
Aphtes, ulcérations, herpès.
Glossite: langue en « carte de géographie », douleurs brûlantes.
Douleurs dentaires.
Caries dentaires: globales, évolution rapide.
La prescription de NATRUM MURIATICUM:
C’est un médicament complémentaire fréquent soit de SULFUR chez un sujet maigre, soit chez un enfant CALCAREA PHOSPHORICA. Ce dernier est le remède de fond constitutionnel, ce qui veut dire que sa prescription sera proposée aussi bien dans un but prophylactique que curatif. Lorsque NATRUM MURIATICUM se trouve indiqué (périodes de surmenage, convalescences, après des stress affectifs, au cours d’affections allergiques...), il faut choisir la posologie en fonction du contexte: pas de trop hautes dilutions en cas de constipation. Le plus souvent, on doit donner ce médicament en 7 CH une fois par jour. Si les problèmes psychiques dominent et en l’absence d’une constipation opiniâtre, on peut donner une 15 CH ou une 30 CH, une ou deux fois par semaine. Puis après disparition des signes, donner CALCAREA PHOSPHORICA pendant plusieurs semaines
L’enfant SEPIA :
SEPIA est considéré à juste titre comme un complémentaire d’aggravation de NATRUM MURIATICUM et son indication peut précéder celle de SILICEA dans la déminéralisation et dans le rachitisme.
Sur le plan orthodontique, SEPIA présente également une aggravation par rapport aux médicaments précédents comme CALCAREA PHOSPHORICA et NATRUM MURIATICUM. J. MEURIS affirme: « La bouche est atrésique et les dents s’entassent littéralement, l’une vestibulaire, la seconde lingualisée et ainsi de suite, mais en conservant leur axe d’implantation normal ». Cela peut s’expliquer par plusieurs causes qui peuvent se combiner. Tout d’abord, l’action principale de SEPIA concerne le système porte avec un retentissement hépatique qui peut expliquer une très nette tendance à l’anorexie, aux nausées et une congestion veineuse de la circulation de retour, dont les maxillaires avec pour conséquence éventuelle une diminution de leur croissance. Ensuite, l’indication de SEPIA chez un enfant signifie que celui-ci réagit électivement sur le mode tuberculinique, avec ses conséquences sur la minéralisation des dents et des maxillaires. Enfin, il y a dans SEPIA une très nette tendance aux élastopathies qui explique son indication chez des sujets luétiques. L’hyperlaxité ligamentaire peut rendre les dents plus sensibles aux forces musculaires auxquelles l’enfant ne peut opposer une résistance efficace. Enfin, ne pas oublier les caries SEPIA: globales et d’évolution rapide, comme pour Natrum muriaticum.
Le comportement:
On a également souvent souligné la similitude du comportement des enfants Natrum mur. et Sepia. J. BARBANCEY explique que, lors de la consultation, le petit Sepia se recroqueville sur sa chaise, jambes entortillées au maximum, il « mange » ses lèvres tandis que ses parents répondent aux questions. Il demande souvent d’aller aux toilettes du fait de son anxiété.
Les signes cliniques:
· L’enfant Sepia est souvent anémié, pâle, émacié, semble plus vieux (ce qui annonce déjà Silicea). Kent affirme même: « L’enfant prend l’aspect d’un vieillard ratatiné et desséché » ! H. VOISIN le décrit ainsi: « Nous aurons affaire à un enfant généralement hépatique. Il est triste, maussade, indifférent et sauvage, n’aime pas qu’on s’occupe de lui (bien qu’il craigne la solitude), n’a aucun goût pour le travail et aime peu jouer bien que sa tristesse et sa sauvagerie disparaissent parfois lorsqu’il est pris par le jeu ».
Les troubles orthodontiques sont les mêmes que ceux de Natrum muriaticum, voire de SILICEA.
· C’est un hépatique: digestion lente, aversion pour les graisses (qu’il ne digère pas du fait de l’insuffisance biliaire), constipation sans besoin, accumulation des selles dans l’intestin, parfois diarrhée jaune; faim ou anorexie, cette dernière en cas de problème psychique et redoutable dans ses conséquences pour la minéralisation des dents si elle durait; céphalées aggravées par les efforts intellectuels....
Troubles cutanés: peau de mauvaise odeur, transpiration irritante et d’odeur forte, éruptions vésiculeuses, notamment autour de la bouche (herpès comme Natrum mur.), eczéma (fréquent chez le tout jeune enfant)...
Enurésie (remède le plus fréquent chez l’enfant avec Lycopodium).
La bouche: sécheresse buccale, gingivite, carie dentaire rapide et globale.
La prévention:
Habituellement, elle est du ressort du médecin traitant. Mais le chirurgien-dentiste homéopathe reconnaissant l’indication de Sepia chez un enfant peut donner quelques conseils: éviter la sédentarité, recommander l’exercice physique (qui améliore), éviter la station debout, proposer des repas fréquents mais peu abondants (pas de lait, pas de graisses, peu de pain).
Prescrire SEPIA en moyenne dilution, par exemple une 7 CH hebdomadaire jusqu’à disparition des signes d’appel, puis passer à CALCAREA PHOSPHORICA.
Commentaire
d'Alain HORVILLEUR
Troubles urinaires avec sensation de poids dans la vessie
L’enfant SILICEA et le RACHITISME:
SILICEA, médicament homéopathique, a son autonomie comme n’importe quel autre médicament, mais il est l’un des principaux remèdes du rachitisme et ce dernier joue un rôle étiologique important dans la genèse de certaines malformations des maxillaires, parfois graves qui nécessitent quelquefois une solution chirurgicale. C’est dire l’intérêt pour le médecin, mais aussi pour le chirurgien-dentiste, de reconnaître le plus tôt possible l’existence d’un rachitisme, d’autant plus que sa rareté relative en France associée à des formes frustres explique qu’on n’y pense pas toujours. Nous avons vu un cas de rachitisme patent chez un enfant dont la maman, persuadée de l’efficacité de son auto-médication, s’obstinait à traiter elle-même des troubles digestifs chroniques par l’absorption d’argile, sans avoir consulté de médecin !
LE RACHITISME:
Comme on le sait, le rachitisme de l’enfant ou l’ostéomalacie de l’adulte sont dus à une carence en vitamine D. Elle existe sous deux formes: l’ergocalciférol (ou vitamine D2) présente dans les levures irradiées et le cholécalciférol (ou vitamine D3) synthétisé au niveau de la peau par le rayonnement solaire. On le trouve également dans les huiles de poissons (dont la fameuse huile de foie de morue) et dans le jaune d’oeuf.
Après avoir été synthétisée dans la peau, la vitamine D3 parvient au foie, puis diffuse dans la circulation sanguine, elle est ensuite réabsorbée dans l’intestin, subit une nouvelle hydroxylation dans le rein. Elle devient alors un métabolite actif dans l’augmentation de l’absorption du calcium alimentaire par l’intestin. L’hormone parathyroïdienne intervient, l’ensemble stimulant la formation de l’os.
Une exposition trop faible au soleil et une carence d’apport de vitamine D sont la cause principale du rachitisme, en dehors des formes familiales (liées au chromosome X). Chez l’enfant, le rachitisme entraîne une décalcification des os en cours de croissance avec hypertrophie des cartilages de conjugaison (par arrêt de la dégénérescence des cellules du cartilage et apposition de couches nouvelles). Une autre cause est fournie par les malabsorptions intestinales de causes variées aboutissant à des carences minérales et vitaminiques.
Le signe le plus évident du rachitisme est la déformation des os: membres inférieurs incurvés, colonne vertébrale (cyphose, scoliose), poignets, chevilles, côtes, le tout avec des douleurs osseuses (bassin) et une faiblesse musculaire associée, sans oublier la tétanie.
Au niveau de la tête, le rachitisme provoque la saillie des bosses frontales, des déformations variées du crâne et des maxillaires. CAUHEPE a montré que les conséquences peuvent être discrètes pour les procès alvéolaires à condition que les forces musculaires restent équilibrées. Ce qui n’est pas le cas lors d’une respiration buccale, ou de la succion des doigts ou encore en cas de troubles de la déglutition et de la phonation. Pour les dents, on décrit un retard de la dentition de lait, une irrégularité dans la chronologie des éruptions, des anomalies de position, de volume et de formes.
EN CONCLUSION
Ce chapitre sur l’orthodontie permet de rappeler quelques notions à propos de la prévention en homéopathie. Car il peut sembler antinomique de rapprocher les deux termes de prévention et d’homéopathie. La prévention implique que les troubles que l’on craint ne sont pas encore présents, puisqu’on veut les ..prévenir ! L’homéopathie exige de résoudre l’équation de la similitude, c’est-à-dire la recherche d’un médicament qui a dans sa matière médicale les mêmes signes et symptômes que ceux du patient. Or ces signes n’existent pas encore !
Si l’on attend que ces symptômes soient présents, il est fort probable que certains d’entre eux risquent de ne plus être réversibles. Et c’est sur ce plan que les conceptions homéopathiques des constitutions et des modes réactionnels rendent d’immenses services, malgré le scepticisme de certains praticiens.
Chacun des constitutions de base = normoligne, bréviligne, longiligne et dystrophique, ont des prédispositions plus ou moins graves. Sur le seul plan orthodontique, les deux constitutions les plus menacées sont d’abord la dystrophique, ensuite la longiligne. La dystrophique a toujours des problèmes de croissance et les médicaments qu’y s’y rapportent ont dans leur matière médicale des malformations maxillaires, alvéolaires et dentaires et une tendance très nette aux malpositions dentaires. La longiligne présente de gros risques de troubles de la minéralisation des dents et des maxillaires dès lors que le mode tuberculinique est mis en œuvre trop tôt et trop souvent.
Lorsque l’on veut tenter une prévention, il n’y a pas de signes et de symptômes. Il reste la constitution et le mode réactionnel, qui permettent d’abord de repérer l’enfant à risque puis de proposer un traitement préventif. Les Calcarea jouent ici un rôle fondamental, de même que d’autres médicaments comme SILICEA, déterminés selon les circonstances et les modes de vie. Il faut rappeler également que les constitutions existent rarement à l’état « pur » et que l’on rencontre le plus souvent des types mixtes. Mais cela n’est qu’un problème de technique et de méthode.
Pour résumer = lorsque l’on a la possibilité de rencontrer un enfant encore très jeune et qu’il appartient à l’un des deux biotypes à risque, il faut donner le médicament homéopathique correspondant, souvent en collaboration avec le médecin traitant parce qu’il est tout de même rare qu’il n’y ait pas d’autres problèmes, O.R.L. souvent. Il faut penser également au problème de la prévention de la carie dentaire.
Lorsqu’un enfant est conduit trop tard à la consultation, les traitements orthodontiques sont théoriquement mieux supportés et plus efficaces lorsque le traitement homéopathique de fond est associé. Il s’agit là de la conviction de quelques orthodontistes homéopathes encore trop peu nombreux et de quelques chirurgiens-dentistes homéopathes omni-praticiens.