MERCURIUS SOLUBILIS
Le mercure fait beaucoup saliver ! Que ce soit lors de son intoxication ou lors de sa pathogénésie.
Mais actuellement, il fait surtout saliver les médias, car il ne se passe pas de semaine sans que la polémique sur les amalgames ne fasse l’objet d’articles de journaux, de controverses, d’affirmations alarmistes et de réponses rassurantes des Officiels, Ordre des chirurgiens-dentistes entre autres. L’objet de ce cours n’est pas d’entrer dans cette polémique, car nous l’avons déjà fait. Mais de présenter le médicament homéopathique, appelé MERCURIUS SOLUBILIS, sous toutes ses facettes en insistant et en développant ses aspects diathésiques différents, sur le plan général puis dans ses applications en pratique odonto-stomatologique.
Le Mercure des Grecs de l’Antiquité correspond à Hermès des Romains, ils en ont fait le Dieu des voleurs ! (Déjà un symbole car dans la tête de certaines associations de consommateurs « dentistes = voleurs ! ! !). Le métal en question était appelé vif-argent par les romains et plus tard les alchimistes l’ont appelé Hydrargyrum (d’où son appellation Hg en chimie). Le nom de mercure, associé au Dieu des voleurs, lui aurait été attribué parce que ce métal a la propriété de s’emparer avidement des autres métaux pour former des amalgames.
C’est HAHNEMANN qui a proposé un mode de préparation original pour rendre le mercure « soluble » dans l’organisme afin de donner une pathogénésie plus étendue. Le procédé de HAHNEMANN est encore utilisé aujourd’hui pour préparer Mercurius solubilis. Sans entrer dans les détails, on utilise du nitrate de mercure, de l’acide nitrique et du mercure métallique. Après contact de 24 heures de ces constituants, la souche est précipitée par de l’ammoniaque. On obtient ainsi une poudre grisâtre que l’on dilue d’abord par trituration dans du lactose/saccharose, puis selon le procédé classique à partir de la 3° CH.
LA TOXICOLOGIE DU MERCURE
1. La toxicité aiguë provoque des signes différents, selon la voie de pénétration du toxique :
Voie respiratoire par inhalation de vapeurs et trachéo-bronchite et pneumonie.
Voie digestive par ingestion de sels de mercure è troubles digestifs (stomatite et gastro-entérite hémorragique, sensation de brûlure, vomissements immédiats et sanguinolents, puis diarrhée séro-sanglante) et troubles rénaux (néphrite tubulaire interstitielle aiguës, anurie ou oligurie, effondrement de l’urée urinaire et hyperazotémie).
Voie cutanée par contact è érythème de formes variées, accompagné d’adénopathies loco-régionales, de fièvre, parfois d’une protéinurie ou eczéma de contact.
2. La toxicité chronique développe un ensemble :
de symptômes généraux = asthénie, anorexie, amaigrissement, anémie, céphalées, douleurs périostées aggravées par la chaleur du lit, agitation anxieuse, sueurs nocturnes abondantes qui ne soulagent pas, éruptions cutanées diverses, œdème avec ou sans albumine, diarrhée... le tout aboutissant à la cachexie.
de symptômes bucco-pharyngés = stomatite et gingivite ulcéro-nécrotique hémorragique, goût métallique, hypersalivation nauséabonde, glossite, hypertrophie des glandes salivaires.
de symptômes neurologiques = irritabilité, troubles de la mémoire, insomnie…, tremblements (mains, lèvres, langue, membres, semblables à ceux de la sclérose en plaques) - puis crampes et contractures musculaires, enfin paralysie flasque), modifications de la personnalité (excitation et dépression), comportement suicidaire…,de troubles rénaux = glomérulonéphrite, insuffisance rénale…
RAPPEL DE LA MATIERE MEDICALE
DE MERCURIUS SOLUBILIS
Un médicament à usage homéopathique existe d'abord par lui-même. Par exemple, le mercure existe depuis la nuit des temps, en tout cas bien avant que les homéopathes se s'en préoccupassent. Et puis il a ce que les homéopathes en font, à partir d'une expérimentation originale, la pathogénésie, complétée par la toxicologie et les renseignements provenant de l'expérience clinique des praticiens.
1 - LES CIRCONSTANCES ETIOLOGIQUES:
· Toutes les affections aiguës, selon R. ZISSU, qui déterminent les 4 stades physio-pathologiques de l'intoxication mercurielle: irritation + exsudation + suppuration + ulcération. Et à cela ont doit ajouter la tendance aux fausses membranes. Il s'agit en fait d'infections saisonnières déclenchées et aggravées par le froid humide, notamment celles du carrefour ORL = angines, coryzas, bronchites, mais aussi intestinales et rénales.
Les toxi-infections alimentaires.
Les intoxications mercurielles: affirmation personnelle qui mérite une confirmation clinique et qui repose sur la notion de la cinétique d'élimination d'un toxique fixé dans les tissus et non éliminés spontanément. Ce peut être le cas des intoxications par le mercure des amalgames dentaires et celles des professionnels du cabinet dentaire qui travaillent dans une atmosphère qui peut contenir des vapeurs de mercure. Il ne faut pas oublier les intoxications exogènes dues par exemple au mercure présent dans les gaz rejetés dans l'atmosphère, la pollution de l'eau et de certains aliments (semences traitées de pesticides), dont se nourrissent des animaux (poissons, oiseux, gibiers).
En glanant ça et là dans les Matières médicales et Répertoires, on trouve en plus les circonstances suivantes:
Suites de suppression de: condylomes, coryza, écoulement, éruption, sueurs des pieds, transpiration, ce qui évoque le mode psorique.
Suites de froid humide, de froid, mais aussi de chaleur.
La dentition.
Après avoir bu de la bière.
Suite d'humiliation.
Suite de masturbation.
Suite d'abus de quinine.
Suite de traumatisme, dont le traumatisme crânien (ce qui évoque le mode sycotique).
2 - SIGNES ET SYMPTOMES PSYCHIQUES:
Rappelons que le mercure est une substance étrangère à l'organisme et qu'il ne peut avoir qu'une action toxique en deux temps, un premier d'excitation et un second de dépression. Par conséquence et logiquement, les symptômes psychiques vont exprimer cette action diphasique.
1./ A la phase d'excitation:
2./ A la phase dépressive:
A retenir la synthèse
L'instabilité psychique
Agitation, hâte, hyperactivité intellectuelle
puis abattement, dépression, hébétude, lenteur d'idéation
3 - SIGNES ET SYMPTOMES GENERAUX:
Synthèse
Ecoulements irritants, épais, excoriants, jaunâtres,
purulents, fétides, sanguinolents
Tendance aux fausses membranes
MODALITES GENERALES:
Aggravation: LA NUIT
Amélioration:
LES GRANDS SYNDROMES LOCO-REGIONAUX
LES TROUBLES HEPATO-DIGESTIFS:
Les troubles digestifs sont pratiquement toujours présents, peu ou prou, notamment la stomatite ou la gingivite ulcéro-nécrotique.
La bouche:
Stomatite et gingivite ulcéreuse ou ulcéro-nécrotique = bouche malsaine, enflammée.
Tendance aux ulcérations et à la suppuration.
Gencive spongieuse, ulcérée, liseré rouge aux collets, sensible au toucher.
Ulcérations à fond grisâtre, couvertes de fausses membranes (ressemblant à la diphtérie ou au muguet). APHTES.
Salivation abondante et nauséabonde, notamment la nuit (tache son oreiller); haleine fétide qui se répand dans la pièce.
Langue épaisse, flasque, étalée, gardant l'empreinte des dents, sale, saburrale.
Goût métallique, sucré, douceâtre, amer, putride, perverti.
Parodontopathie chronique avec poches suppurées, mobilité dentaire, rétraction gingivale, dénudation = caries des couronnes alors que les racines restent intactes.
Sensation de dents trop longues, douleurs dentaires la nuit et surtout pendant la mastication, aggravées par les températures extrêmes, la nuit, améliorées par la friction de la joue.
Sensation de brûlure dans toute la bouche avec les modalités décrites.
Mercurius solubilis convient aussi bien aux formes aiguës que chroniques. On lui préfère ou on lui associe en alternance Mercurius corrosivus lorsque les ulcérations dominent ainsi que les douleurs brûlantes. Mais la présence d'une suppuration confirme Solubilis.
Première remarque
Il faut se garder de la prescription systématique de Mercurius sur les seuls signes buccaux, qui sont ceux de l'intoxication et que l'on peut retrouver peu ou prou avec d'autres toxiques. Il est nécessaire d'étendre la similitude à quelques signes psychiques ou généraux, même discrets
Deuxième remarque
MERCURIUS SOLUBILIS est sans aucun doute le médicament le plus souvent impliqué dans le traitement des aphtoses buccales, souvent dans la poussée aiguë (à comparer à Corrosivus) et dans les formes chroniques. Pour la double raison suivante: ce médicament a dans sa pathogénésie les signes lésionnels de l'aphtose buccale et en plus les signes les plus caractéristiques du mode réactionnel luétique. Mais ce n'est pas une raison suffisante pour le prescrire systématiquement sans rechercher une similitude suffisante
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Malgré l'importance et la constance des signes buccaux, les autres secteurs de l'appareil digestif peuvent ou sont concernés:
Foie hypertrophié, sensible au toucher, douloureux (douleurs pressives, piquantes ou élançantes aggravées couché sur le côté droit).
Appétit variable mais aversion pour la viande, pour les aliments gras, pour le café, le vin, intolérance pour le lait et les sucreries. Soif souvent augmentée, surtout dans les affections aiguës.
Digestion difficile: renvois et régurgitations de liquides rances après les repas, nausées, brûlures, flatulence, crises diarrhéiques, poussée thermique nocturne avec sueurs grasses, malodorantes, ne soulageant pas.
Dyskinésie biliaire = induration du foie, tendance à la lithiase biliaire puis à la dégénérescence hépatique (ne pas oublier que MERCURIUS est l'un des remèdes de l'alcoolisme chronique, qui elle même est l'une des causes du mode réactionnel luétique).
Recto-colite avec coliques, diarrhée dysentériforme et ténesme, selles aqueuses, verdâtres, parfois sanguinolentes, sensation d'exonération incomplète malgré les efforts, faiblesse après la selle. Brûlures rectales pendant et après la selle
LES TROUBLES RESPIRATOIRES:
C'est encore une fois un secteur de la pathologie qui voit une prescription trop souvent systématique, à partir du seul diagnostic clinique, sans individualisation suffisante et le plus souvent en alternance avec BELLADONA. Rappelons encore une fois que MERCURIUS SOLUBILIS peut être indiqué aussi bien dans les formes aiguës que chroniques.
Rhinite ou rhino-pharyngite, angines, coryza aigu, avec écoulement aqueux, abondant, épais, jaunâtre, le plus souvent brûlant, irritant, avec les narines irritées et ulcérées. L'écoulement peut avoir une odeur désagréable qui rappelle le vieux fromage (HEPAR SULFUR). Nécrose des os du nez, ozène, sinusite. Ces troubles sont très fréquemment accompagnés d'une stomatite ou gingivite avec les signes buccaux déjà décrits.
Bronchite avec toux sèche, spasmodique la nuit, mais grasse le jour avec une expectoration muco-purulente, toujours jaune verdâtre. Asthme amélioré en fumant et au grand air.
Laryngite avec voix rauque, douleurs, pire par changements de temps ou de température.
LES TROUBLES RENAUX:
Bien entendu, les troubles rénaux ne concernent pas le chirurgien-dentiste, mais l'insuffisance rénale chronique a des conséquences bucco-dentaires, notamment la parodontopathie. Il faut donc les connaître.
Néphrite aiguë après froid humide, changements de temps ou de température, urines foncées, peu abondantes, sanguinolentes, parfois albumineuses, tendance urémique (sans œdème). la concomitance de la stomatite est presque constante ainsi que l'aggravation nocturne et les sueurs huileuses laissant mal à l'aise.
Néphrite chronique avec insuffisance rénale, urines foncées peu abondantes, toujours sanguinolentes et albumineuses. Le malade maigrit, présente des paralysie, puis de la sclérose et évolue vers un état cachectique par urémie de plus en plus grave (en l'absence de traitement évidemment).
Urétrite avec écoulement muco-purulent, jaune verdâtre, brûlant, irritant, fétide, tendance à la suppuration, à l'ulcération….Leucorrhée continuelle, pire la nuit, verdâtre, brûlante et irritante, prurit aggravé après la miction, amélioré par les lavages à l'eau froide.
LES TROUBLES OCULAIRES:
Blépharite aiguë ou chronique = paupières rouges, enflammées, croûteuses, ulcérées, collées la nuit et le matin au réveil, écoulement muco-purulent, irritant et brûlant.
Yeux rouges, larmoyants, larmes irritantes, brûlantes…
LES TROUBLES CUTANES:
La peau d'un sujet justiciable de MERCURIUS est toujours moite, même en dehors de toute pathologie lourde. C'est l'un des signes définissant son type sensible. Mais à la moindre occasion, le sujet transpire, transpire beaucoup surtout la nuit, ce qui le laisse mal à l'aise. D'autant plus que cette transpiration a souvent une odeur désagréable. Sur cette peau apparaissent diverses lésions avec les signes suivants:
Eruptions vésiculeuses ou pustuleuses, ou abcès, avec toujours = une rougeur de la peau, peu de sensibilité au toucher, parfois une sensation de froid local.
Toute éruption avec rougeur et moiteur de la peau, prurit pire la nuit et à la chaleur du lit.
Tendance à l'ulcération de forme irrégulière, aux bords mal tracés, tendant à s'étendre en surface (phagédénique). L'ulcération voit ensuite ses bords s'indurer, un pus apparaître = verdâtre, brûlant, corrosif, tendant à la chronicité.
Adénopathies satellites.
MERCURIUS est donc un remède possible d'impétigo, d'intertrigo, d'herpès, d'eczéma, de furoncles, etc…
LES ALGIES:
MERCURIUS est un remède de diverses douleurs :
Douleurs dentaires même en dehors d'une gingivite, < la nuit, < par la chaleur externe, par les températures extrêmes, < en mangeant, < en buvant chaud, > par la friction de la joue correspondante.
Douleurs articulaires rhumatismales, déchirantes ou piquantes, < par la chaleur, du lit notamment, par le mouvement, par les températures extrêmes, en transpirant. Douleurs apparaissant et aggravées par temps humide. Plus fréquentes au dos, à la nuque, aux membres supérieurs, au sacrum.
Céphalée faisant suite à la suppression brutale des sueurs ou d'un écoulement = douleurs constrictives, brûlante, avec sensation de plénitude de la tête, avec les modalités thermiques habituelles.
LES TROUBLES OSSEUX:
L'os fait partie des cibles du mercure. Il se produit une inflammation, c'est-à-dire une ostéite avec plusieurs caractéristiques = tendance à la suppuration, douleurs et ensuite nécrose. En dehors de l'ostéite, on constate des douleurs osseuses ou périostées, notamment au niveau des tibias. Ces douleurs sont à type de brûlure, elles sont aggravées la nuit, à la chaleur du lit, par les températures extrêmes. Ces douleurs sont souvent appelées "ostéocopes" parce qu'elles ressemblent à des douleurs provoquées par des fractures. Elles sont l'une des caractéristiques du mode réactionnel luétique.
L'ostéite avec suppuration et nécrose peut se produire au niveau de n'importe quel os, mais avec une prédilection pour les os de la face (sinusite, rhinite, ozène…), avec un pus jaune verdâtre, toujours irritant et de mauvaise odeur. On retrouve là la maladie parodontale, dont MERCURIUS est l'un des principaux remèdes.
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Nous avons gardé pour la bonne bouche (!!!) l'action du mercure sur le système circulatoire. Elle concerne tous les secteurs de cet appareil = système lympho-ganglionnaire, sang, organes richement vascularisés.
Le mercure étant une substance étrangère à l'organisme, celui-ci réagit dans un premier temps par une excitation, qui se traduit au niveau des ganglions lymphatiques par une tétrade caractéristique = irritation, exsudation, suppuration, ulcération et le ganglion concerné s'hypertrophie. Cela explique la prédilection de MERCURIUS pour le rhino-pharynx avec l'hypertrophie des amygdales. Tout l'ensemble physiopathologique évoque une fois encore le mode réactionnel luétique.
Par ailleurs, on sait que le sang contient de nombreux métaux ou métalloïdes = zinc, cuivre, magnésium, sodium, potassium, calcium, soufre, etc… Or les dentistes en particulier connaissent bien la tendance du mercure a produire des amalgames ! En se combinant avec ces métaux, le mercure provoque un ensemble de troubles = anémie avec tendance à l'hémorragie (les sécrétions et excrétions contiennent presque toujours du sang, comme celles de PHOSPHORUS, remède du mode tuberculinique), modifications hygrométriques (expliquant l'aggravation par l'humidité, la rétention hydrique, le tout évoquant le mode sycotique). Le mercure provoque également des troubles du métabolisme du soufre qui est présent dans les globules rouges et dans diverses protéines du sang, de même que dans de nombreuses immunoglobulines (sous forme de ponts disulfures). Le tout explique l'apparition de signes qui évoquent SULFUR = la thermophobie, l'aggravation par les températures extrêmes, le besoin de sortir les pieds du lit par aggravation par la chaleur du lit, etc… Voilà des rapports avec le mode réactionnel psorique dont on peut entrevoir quelques conséquences = le souffre participe à tous les processus d'élimination de l'organisme. En perturbant le métabolisme du soufre, le mercure entrave ces processus éliminatoires et peut ainsi s'accumuler. Ainsi explique-t-on sans doute pourquoi certains individus qui n'avaient pendant des années aucun problème avec leurs obturations dentaires par des amalgames, peuvent présenter quelques troubles.
La prescription de MERCURIUS dans ces cas peut provoquer une aggravation temporaire mais souvent désagréable par mobilisation de sels de mercure jusque-là fixés et non éliminés spontanément.